BP 12
Tindouf (Algerie) |
Pétition adressée à Sa Majesté Juan Carlos I, Roi d'Espagne,
à l´occasion du 55ème anniversaire de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, le 10 décembre 2003.
Majesté,
Le peuple sahraoui n'a jamais oublié ces mots que vous avez prononcés, un certain 2 novembre 1975, à Laayoune: « Nous souhaitons protéger les droits légitimes de la population civile sahraouie, ainsi que l'exigent notre mission dans le monde et notre histoire. » Malheureusement, cette promesse, l'Espagne ne l'a pas tenue.
Nous, auteurs et signataires de la présente pétition, gardons néanmoins confiance en votre parole, Majesté. Nous demandons la justice et la paix pour le peuple sahraoui forcé à tant d'années de souffrance et d'injustice depuis l'invasion de sa terre par le Maroc, en 1975.
La question du Sahara Occidental, sa résolution en conformité avec les droits élémentaires de l'Homme et des peuples, demeure une dette au passif de l'Espagne.
Aujourd'hui, c'est peut être l'ultime opportunité d'obtenir la résolution pacifique de ce conflit qui a tant duré. En effet, le Conseil de sécurité des Nations Unies a décidé de demeurer saisi de la question et réclame l'appui politique de tous pour permettre l'exécution du Plan pour l'Autodétermination du Peuple du Sahara Occidental notamment en sa résolution 1495.
La situation issue de l'invasion du territoire sahraoui par les forces armées marocaines constitue une aggression et une violation grave du droit international en vigueur. Violation restée impunie à ce jour.
Les Sahraouis demeurent divisés par un mur de défense que les forces de l'envahisseur ont édifié, isolant une grande partie du Sahara Occidental. A l'intérieur, des régions occupées et circonscrites par le Maroc, la population sahraouie subit quotidiennement une répression violente de l'occupant marocain, en particulier des violations flagrantes des droits de l'homme, régulièrement dénoncées par les organisations internationales de défense des droits de l'Homme. Ceux de l'extérieur, vivent les dures conditions de l'exil.
Après toutes ces années de souffrance et de résistance devant l'occupation de son territoire par le Maroc, le peuple sahraoui continue de clamer sa souveraineté, son droit à l'autodétermination. Jusqu'ici, la négation de ce droit fondamental affecte sérieusement le développement du peuple sahraoui ainsi que l'équilibre des pays voisins du Sahara Occidental. Ces derniers continuent de subir les tensions d'une situation géopolitique explosive résultant de la non-résolution du problème de la colonisation du Sahara Occidental. Et la gravité de cette situation s'accentue de jour en jour, en raison, notamment, de la complaisance de certains Etats cautionnant directement ou indirectement l'agression du peuple sahraoui par le régime marocain, au lieu d'oeuvrer pour l'établissement de la démocratie et le respect des droits de l'homme.
Combien de temps encore va-t-on permettre au régime marocain de coloniser impunément un territoire qui n'est pas le sien ? Combien de jours la répression policière marocaine va-t-elle continuer de terroriser les civils sahraouis demeurant dans les territoires occupés par le Maroc qui tente de les réduire à néant par tous les moyens à sa disposition ? On se permet tout contre le peuple sahraoui : disparitions forcées, assassinats et exécutions sommaires, détentions arbitraires, torture et mauvais traitements, jugements expéditifs incluant menaces avec représailles, tentatives d'intimidation et licenciements arbitraires des travailleurs dans les territoires occupés par le Maroc.
A ce propos, nous saluons l'intervention du chef du gouvernement espagnol, D. José Maria Aznar, en faveur de la libération par le Front Polisario de 458 prisonniers de guerre marocains. Nous souhaitons que le gouvernement espagnol continue d'agir pour mettre fin au drame des prisonniers de guerre et de leurs familles, aussi bien marocains que sahraouis. Ainsi serait-il opportun que les autorités espagnoles interviennent auprès du gouvernement marocain afin que ce dernier consente à libérer tous les prisonniers d'opinion sahraouis et les centaines de disparus emmurés depuis des années.
Nous approuvons le fait que l'Espagne entretienne de bonnes relations avec son voisin du sud. Mais ces relations doivent s'établir dans le respect des principes démocratiques chers à l'Espagne. De telles relations privilégiées entre l'Espagne et le Maroc, devraient au contraire activer la recherche de solutions démocratiques pour résoudre les conflits locaux. Le gouvernement espagnol devrait aider le Maroc à se dégager du problème du Sahara Occidental.
Si les Marocains, pour leur part, pensent que les Sahraouis sont majoritairement favorables au Sahara Marocain, pourquoi les empêche-t-il de s'exprimer librement par l'intermédiaire d'un référendum dont le principe est approuvé par l'ensemble de communauté internationale ?
Il devra répondre devant l'Histoire et devant ses enfants, de crime contre l'humanité et de la violation de ses propres principes fondateurs. Il aura empêché l'application de la résolution 1514 de l'ONU sur l'octroi de l'indépendance aux peuples des pays colonisés, trahit l'article 1 de la charte de l'OUA sur le respect des frontières héritées du colonialisme, révoqué l'arrêt de la Cour internationale de justice confirmant la non souveraineté du Maroc au Sahara Occidental, méprisé la Convention internationale des Droits de l'Homme de Genève. Le régime alaouite aura royalement renié la justice au nom de laquelle il recouvrait son indépendance en 1956. Après quarante-quatre ans de tutelle étrangère, le Maroc indépendant sera devenu progressivement un Etat voyou, un Etat délinquant. Au lieu de cela, nous adjurons le Maroc d'aider à la mise en œuvre du plan Baker adopté par le Conseil de sécurité des Nations Unies en sa résolution 1495. Elle offre au Maroc, au Front Polisario et aux pays limitrophes du Sahara Occidental l'opportunité d'en finir avec cette guerre et, côte à côte, coude à coude, de construire un Maghreb prospère.
La solution proposée par l'ONU n'est idéale pour aucune des deux parties en conflit, elle a néanmoins le mérite d'ouvrir la voie de la réconciliation, du dialogue, de la tolérance et du respect mutuel, essentiels au développement et à l'équilibre de cette région.
Si le Maroc persiste dans sa conduite hostile à la légalité internationale au Sahara Occidental, l'Espagne, pays voisin et ami, puissance démocratique, doit prendre toutes les mesures diplomatiques, économiques et politiques nécessaires pour aider l'ONU à parachever sa mission au Sahara Occidental. Ce serait une façon adéquate de « protéger les droits légitimes du peuple sahraoui, ainsi que sa mission dans le monde et son histoire l'exige » pour reprendre vos propre mots, Votre Majesté, prononcés devant ce peuple même, en 1975. Nous voulons vous transmettre nos salutations et un message d'espoir. Espoir d'un monde juste où règne la paix, la sécurité et le bien-être de tous les peuples de notre région.
Nous voulons également saisir cette occasion pour rendre hommage à toutes les associations et comités de soutien au peuple sahraoui qui, chaque jour, apportent une aide indispensable pour soulager les peines de milliers d'enfants, de femmes et d'hommes affrontant quotidiennement depuis des décennies, un véritable plan d'extermination à leur encontre.
Signatures :
Collectif de défense des droits de l'Homme au Sahara Occidental
Association des familles de disparus sahraouis (AFAPREDESA)
Union des juristes sahraouis(UJS)
Union nationale des femmes sahraouies (UNMS)
Union générale des travailleurs de la Saguia El Hamra et du Río de Oro (UGTSARIO)
Union des jeunes de la Saguia El Hamra et du Rio de Oro (UJSARIO)
[HOME]