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UNION DES JURISTES SAHRAOUIS

Genéve le 14.04.2002

58ème session   de la COMMISSION DE DROITS DE L'HOMME des Nations unies

Point : 11 a) et 11 b) (droits civils et politiques)

Orateur : Abba Salek El Haissen

 

Monsieur le Président,

Depuis 1975, le conflit politico-militaire que connaît le Sahara Occidental se caractérise principalement par la répression atroce exercée par l'Etat marocain. Des centaines de sahraouis sont toujours portés disparus. On pense qu'ils croupissent dans les bagnes secrets marocains et qu'ils subissent les tortures physiques et psychologiques les plus barbares. Les campagnes d'enlèvement et d'arrestation ont frappé les différentes générations de la population Sahraouie à savoir des personnes âgées, des jeunes, des femmes"même enceintes", des nourrissons,...etc. Plusieurs corps marocains sont impliqués dans la pratique ignoble de disparition forcée ou involontaire. Il s'agit notamment des forces armées royales (FAR), de la gendarmerie royale, des forces auxiliaires, des agents de la DST (Département de la Sécurité Territoriale) et de la PJ (Police Judiciaire) ainsi que le corps des Compagnies Mobiles D'Intervention (CMI) sans parler des différentes composantes des appareils du Ministère de l'Intérieur... Pour camoufler ces crimes commis contre les Sahraouis, l'Etat marocain a procédé au quadrillage militaire, sécuritaire et médiatique du Sahara Occidental. Ces disparitions forcées relèvent d'une pratique généralisée tendant à semer la terreur au sein de la population contraire, en sa majorité, à l'occupation illégale du Sahara Occidental par Royaume du Maroc.

Grâce à la pression internationale exercée sur le régime de Hassan II, 321 disparus ont été libérés en juin 1991. Ce sont des Sahraouis qui étaient séquestrés dans les bagnes secrets d'AGDEZ, de KALAAT MEGOUNA, de SKOURA et "PC CMI" de El Aaiun. 57 autres personnes étaient décédées dans ces mêmes bagnes sans que leurs dépouilles mortelles ne soient restituées à leurs familles, en dépit de la reconnaissance du gouvernement marocain des décès sous détention de certains de ces cas sans donner les informations pertinentes quant au circonstances de leur mort. Parmi les 378 personnes qui formaient ce groupe 73 étaient des femmes, dont 19 parmi elles allaitaient au moment de leurs enlèvement.

Le gouvernement marocain continue de nier sa responsabilité quant à l'enlèvement et la disparition des centaines de citoyens sahraouis. Dans certains cas, le gouvernement donne des réponses évasives dans une tentative désespérée de se dégager de sa responsabilité. A titre d'exemple, la famille de M. Sid Ahmed Babih Bhaya (MOUMEN) disparu le 10 juillet 1976, n'a toujours pas information crédible quant au sort de leur parent. Le gouvernement

du Maroc prétend que M. Sid Ahmed Babih Bhaya (MOUMEN) est établi dans les camps de réfugiés sahraouis. Ce qui a été contesté aussi bien par la fille du disparu, Madame Mariem Sid Ahmed Babih, vivant dans les camps des réfugiés sahraouis que par son fils Mohammed-Mahmoud MOUMEN résidant à Smara aux territoires occupés du Sahara Occidental et qui a pu participer aux travaux de cette session de la Commission des Droits de l'Homme de l'ONU.

Monsieur le Président,

La disparition forcée ou involontaire d'un être humain est un crime permanent. Il s'agit d'une situation présente qui nous interpelle quotidiennement tant que le cas n'a pas été élucidé. Les familles ne savent si leurs parents sont encore en vie ou s'ils sont morts. Elles sont contraintes de vivre dans l'angoisse : un état de cruauté et de torture permanent. La perpétuation de cette situation permet l'impunité des responsables matériels et intellectuels. Des droits fondamentaux sont bafoués. La communauté internationale et les différents collectifs engagés dans la défense des droits humains aspirent à la vérité et à la justice, seul moyen à même de permettre l'éradication de l'ignoble phénomène des disparitions forcées ou involontaires.

Les autorités marocaines ont créé un Conseil Consultatif des Droits de l'Homme et une Commission d'Arbitrage auxquelles elles ont confié le soin de délimiter le nombre des personnes disparues et de procéder à l'indemnisation des victimes des disparitions. Par cette approche, les autorités marocaines tentent de résumer la situation des disparitions forcées à une simple question de réparation arbitraire pour certains et seulement certains des cas de disparus. Non seulement la préoccupation fondamentale des responsabilités encourues a été laissée à côté mais aussi, ce qui est plus grave encore, la négation de ces instances de reconnaître les cas de disparus sahraouis a été adoptée comme règle non avouée.

Les démarches entreprises par les autorités marocaines montrent ainsi leur limites. C'est pourquoi, la question des disparus doit être reprise aussi bien en ce qui concerne la vérité des faits et le jugement des responsables pour crimes contre l'humanité que pour les aspects relatifs à l'indemnisation des victimes ou de leurs ayants droit.

L'Association Américaine des Juristes appelle à la création d'une Commission indépendante et impartiale chargée de traiter dans sa totalité le phénomène des disparitions forcées et les autres violations graves perpétrées au Sahara Occidental par les forces d'occupation. Il lui appartiendra de dégager et d'établir la vérité ainsi que de désigner les responsabilités encourues.

Merci M. le Président


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