OPINION
Quand les oulémas du Palais se font entendre !!
Baba M. Sayed
Quand
les oulémas du Palais royal marocain se sont faits entendre, au
cours des derniers jours, ce n’est pas pour défendre les
millions de marocains qui vivent dans la misère, et qui ploient,
depuis des siècles, sous le poids d’une monarchie féroce
qui les a privé de tous de leurs les droits, y compris de celui
de crier leur douleur.
Quand les
oulémas du Palais ont souhaité prendre publiquement et
officiellement la parole, ce n’est pas pour défendre les enfants
de la Palestine ou du Liban, ou protester contre la poursuite d’une interminable et injuste guerre que le Palais royal marocain
poursuit, depuis plus de trois décennies, au Sahara Occidental
contre leurs coreligionnaires et voisins Sahraouis; guerre qui greffe
les maigres économies du Royaume, condamne une grande partie de
la population sahraouie à l’exil, et hypothèque toute
possibilité de faire sortir le projet du Maghreb de sa
chrysalide.
Quand les oulémas du Palais ont décidé,
récemment, de rompre leur habituel silence et de communiquer
avec leurs compatriotes ce n’est, malheureusement, pas pour
défendre le droit et la justice, comme ils devraient le faire,
dans un pays dont la réputation est d’être un État
de non droit, ni pour dénoncer l’état de servitude
révoltante des «sujets» marocains, ni pour
préconiser d’audacieuses réformes afin d’améliorer
ou changer un système politique marocain, sclérosé
et archaïque, mais pour s’en prendre, dans un langage tendancieux
et vulgairement calomnieux, à Youssef al Quardaoui, un
éminent et respectable savant musulman qui représente,
pour l’ensemble des musulmans, une autorité morale
incontestable. Et pour quelle raison ?
Officiellement, parce que le respectable savant a émis, de
l’intérieur du pays d’Amir al-mouminin (commandeur des
croyants), une fatwa où il autorise les marocains
nécessiteux et qui ne disposent pas de toit pour s’abriter
contre les aléas du temps et de la nature de faire des emprunts,
y compris avec intérêts, auprès de banques pour
pouvoir disposer de logements, officieusement, parce que le savant en
question a affirmé solennellement, et à la veille
d’échéances électorales décisives pour
Mohamed VI et son équipe, que la falsification
d’élections est aux yeux de l’islam « un crime
majeur» !!
Évidemment, une telle déclaration, faite de
surcroît de l’intérieur du Maroc, par une autorité
morale de l’importance d’al Quardaoui ne peut que soulever l’ire de
responsables marocains habitués, depuis des lustres, à
faire de leur pays un laboratoire d’expérimentation de toutes
les manœuvres et les ruses destinées à dévoyer la
démocratie à laquelle ils se disent, pourtant, fermement
attachés, et la vider de sa substance, tout en veillant à
en sauvegarder la façade et les apparences.
C’est donc en tant
que représentants d’une institution officielle du Makhzen, que
les oulémas du Palais se sont sentis obligés de
faire savoir -dans un langage, il est vrai, peu digne de savants-
à un Quardaoui médusé, que dans le «Royaume
de Sa Majesté», le seul et unique crime majeur n’est, et
ne peut –être, que celui de
«lése-Majesté» !!
Lahawla wala kouata illa bi Allahi al Adim !!
10.10.06