Maudite famille royale
Baba M. Sayed
Le Makhzen vient de charger, devant la porte du Palace où loge la mission du Haut commissariat des Nations unies pour les droits de l'homme, des manifestants pacifistes à l'Aaioun, chef lieu du Sahara Occidental, avec une violence et une sauvagerie indescriptibles.
Au cours des violentes charges successives effectuées par les forces d'occupation marocaines, plusieurs sahraouis ont été blessés. Certains gravement.
Pour bâillonner les sahraouis, les empêcher de crier leur ras-le-bol de la présence coloniale marocaine et empêcher la mission des Nations unies de se rendre compte de l'ampleur des graves et régulières violations des droits de l'homme au Sahara Occidental dont les différentes organisations civiles, militaires et paramilitaires marocaines se rendent, quotidiennement et dans l'impunité totale, responsables, le pouvoir marocain n'a pas, comme à son habitude, lésiné, ces derniers temps, sur l'importance des moyens à utiliser. Et comme d'habitude, les dégâts collatéraux ont été manifestes, nombreux et graves.
Objet quotidien -au vu et au su de la Mission des Nations unies pour un référendum au Sahara Occidental (MINURSO) venue leur promettre en 1991 de les aider à disposer librement de leur avenir, de toutes les formes de vexations- d'humiliations de la part des forces d'occupation marocaines, les sahraouis, révoltés, ne peuvent plus ne pas s'interroger, dorénavant, sur l'utilité et l'efficacité de leur stratégie de résistance pacifique.
Ils ne peuvent plus ne pas se demander, à présent, jusqu'à quand ils peuvent encore accepter de continuer d'opposer à la violence et à la barbarie aveugles que leur oppose le Makhzen leurs seuls cris de révolte et de détresse ? ils ne peuvent plus ne pas se demander, face à l'indifférence de la communauté internationale et à l'apathie du Front Polisario, jusqu'à quand ils peuvent encore résister à la tentation d'user, face à la violence aveugle du Makhzen, de la violence légitime pour se défendre, défendre leurs propriétés et leurs biens ?
Excédés et déçus par la paralysie des institutions de la République Arabe Sahraouie Démocratique et du Front Polisario [1] et révoltés par le peu d'intérêt que la communauté internationale accorde à leur opiniâtre, courageuse et difficile résistance pacifique, les sahraouis ne peuvent plus, désormais, faire l'économie d'une profonde réflexion sur le bien fondé de leur stratégie pacifique. Ils paraissent de plus en plus massivement convaincus que, devant les affligeants et répétitifs spectacles d'épouses et de surs violées, de frères ou d'amis régulièrement massacrés, gravement blessés ou injustement embastillés par les Groupements Urbains de Sécurité (GUS), l'armée royale, la direction de sécurité du territoire ou les forces auxiliaires marocaines, les moyens pacifiques qu'ils ont jusqu'ici privilégiés dans le cadre de leur résistance n'ont pas été d'une grande utilité face aux capacités destructives de l'appareil de répression marocain. En tout cas, ces moyens pacifiques n'ont pas empêché les autorités marocaines de quadriller l'ensemble des zones occupées de la République Arabe Sahraouie Démocratique et de les soumettre à un régime de non droit qui a favorisé tous les dépassements et dérapages.
Le colonialisme disait le général Giap est un mauvais élève qui ne retient aucune leçon de l'histoire. Le colonialisme marocain est non seulement un mauvais élève, les trente dernières années nous l'ont amplement montré, mais aussi et surtout un élève cynique, mal élevé, peu respectueux des autres et habitué à ne craindre que ceux et celles qui se montrent prêts à lui opposer une réelle détermination dans la défense de leurs droits et de leur liberté.
Conforté dans son intransigeance par les gouvernements successifs français et tout récemment par le premier ministre espagnol Zapatero et son équipe qui leur doivent, ne l'oublions pas, leur arrivée au pouvoir, le Royaume du Maroc est en train expérimenter au Sahara Occidental une politique coloniale caractérisée qui mine la stabilité et la paix dans la région et sème la haine et la discorde entre ses peuples. Peuples tout unit pourtant: la religion, l'histoire, la géographie, la langue et la culture
Jusqu'à quand les peuples du Nord Ouest de l'Afrique doivent-ils subir dans la résignation les caprices et les pratiques humiliantes de la famille royale marocaine et accepter, sans broncher, de subir les conséquences désastreuses de sa politique du pire avec le risque désormais sérieux de perdre leur dignité et leur honneur ?
[1] Je tiens à rendre, ici, un hommage chaleureux et bien mérité à Mohamed Sidati, ministre sahraoui chargé de l'Europe, pour l'excellent travail qu'il accomplit quotidiennement auprès des institutions européennes pour défendre les intérêts légitimes du peuple sahraoui et sensibiliser les responsables et les élus occidentaux sur les violations caractérisées des droits de l'homme et de la femme sahraouis par les forces d'occupation marocaines.
20.05.06