Réponse à la lettre ouverte de la Voie démocratique du 10 décembre 2006.
Naâma Ould Abdi Ould Moussa (Asfari)
Ali Omar Yara
La Voie démocratique, le collectif des Associations des droits de l’homme (AMF, ASDHOM, APADM,
ATMF , FVJ-France, Institut Ben Barka),
appuyé par l’AFASPA ont célébré le 10
décembre 2006 à Paris, la journée internationale
des droits de l’homme par l’organisation d’une manifestation au Parvis
des libertés et des Droits de l’homme, Esplanade du Palais de
Chaillot Trocadéro (Paris). Le Comité pour le respect des
libertés et des droits humains au Sahara occidental (CORELSO) a
participé à cette manifestation. L’association A.RASD a
également pris part à celle-ci.
A cette occasion, nous, militants Sahraouis ont pris connaissance de la
publication d’une « lettre ouverte » au Maroc
destinée au Gouvernement Marocain et au Front POLISARIO,
représentant légitime du peuple Sahraoui.
En voilà le texte intégral (traduction de l'arabe A. Yara):
« La voie démocratique. Le Secrétariat National. Casablanca le 2 décembre 2006.
Dans ces derniers temps, le conflit autour du Sahara s’est trouvé dans une impasse, après l’échec d’un grand nombre de tentatives afin de trouver une issue qui satisfasse toutes les parties. Ce qui, par conséquent, menace la sécurité et la stabilité de la région et les intérêts et l’avenir de ses peuples. Ainsi, depuis l’avènement de Mohammed VI., qui était porteur d’espoir et de solution, ce conflit perdure depuis plus de trois décennies, durant lesquelles tous ces espoirs sont partis en fumée alors que le problème demeure depuis sept ans tel quel.
De ces faits, la Voie Démocratique :
Consciente de la dangerosité du piège vers lequel s’oriente le Sahara ;
Contenu du fait que le conflit sur le Sahara a causé des souffrances humaines sans limites, parmi lesquelles : des dizaines de milliers d’expatriés ; la mort de milliers de victimes dans la guerre ; dans les lieux secrets de détention ; l’arrestation d’un grand nombre ; le gaspillage des richesses et des potentialités énormes qui devaient être investies dans le développement et pour l’amélioration des conditions de vie des peuples de la région au lieu de profiter à des marchands d’armes et quelques grands responsables militaires et spéculateurs ;
Contenu que l’affaire du Sahara est utilisée par ceux qui en profitent pour faire avorter la lutte du peuple marocain pour la démocratie et la justice sociale, car quand la lutte populaire s’accélère et que le mouvement se renforce pour un vrai changement démocratique, on s’abrite derrière la situation dans le Sahara pour un « consensus » qui vise à frapper le mouvement de lutte populaire ;
Vu le devoir de la Voie Démocratique comme force politique qui continue à militer en faveur de la liberté et la démocratie sur la voie socialiste et en faveur de l’unité populaire du grand Maghreb comme une nécessité historique inévitable et qui dénonce le chauvinisme et appelle à une solution politique de l’affaire du Sahara conformément à la légitimité internationale :
La Voie démocratique demande au Gouvernement marocain et au Front Populaire de libération du Saguiet El Hamra et de Rio de Oro de s’asseoir à la table des négociations pour trouver sérieusement une solution politique négociée dans le cadre des décisions de l’organisation internationale.
La Voie Démocratique est prête à participer au succès de cette initiative. Rappelons d’une part, la lettre du Secrétariat général, adressée au Conseiller du Roi Mohamed VI., Mr. Mohamed Moâtassim, après l’invitation de se présenter au Palais royal le samedi, 4 mars 2006 pour participer à une table sur le Sahara qui réunit les dirigeants des partis politiques marocains et d’autre part, l’invitation de l’Assemblée Nationale de la Voie Démocratique tenue le 5 juin 2005 à Casablanca au Gouvernement Marocain et au Front Populaire de libération du Saguiet El Hamra et de Rio de Oro pour libérer les victimes de la guerre des deux parties.
Le Secrétariat National
Le Secrétaire national, Abdallah El Harif. »
Nous avons à repenser avec nos camarades démocrates
marocains la cause des Sahraouis et leur expliquer, nous, militants
dans la société civile sahraouie, les
préoccupations majeures de notre nouveau combat, pour permettre
au peuple sahraoui de disposer de lui-même.
Il est de notre nature politique de soutenir An-Nahjad Dimoqrati et de renforcer sa lutte. La preuve, notre soutien mutuel dans les fêtes de l’humanité et notre présence, en tant que Sahraouis dans la célébration du 10 décembre 2006 sur le Parvis des droits de l’homme, Paris.
La lettre
ouverte de la Voie démocratique n’est pas la seule,
adressée aux deux partis en conflit, mais elle évalue la
conjoncture actuelle du « conflit sahraoui » (Cf.
Opinions Arso Contre le génome de l'occupation du Makhzen
et pour la libération de tous les prisonniers, 20 mai 2005,
Penser la cause sahraouie avec des intellectuels marocains, 15 juin
2005, Le cri vibrant d'une impuissance politique, Dialogue avec
Abdellatif Laâbi sur la cause sahraouie, 8 juillet 2005).
Il est utile de rappeler à nos camarades : que
l’échec des négociations entre le Maroc et le Front
Polisario est dû à la spéculation du système
politique international et à l’impossibilité du Maroc de
respecter ses engagements vis-à-avis de la communauté
internationale, ce qui a conduit fatalement les Sahraouis à
chercher d’autres moyens pacifiques de lutter en faveur de la
décolonisation totale. En effet, la période
post-cessez-le-feu, le 6 septembre 1991 au Sahara occidental, n’a pas
pu déboucher sur une solution de décolonisation du Peuple
sahraoui, but premier de la démarche de la communauté
internationale.
Le rapport de causalité entre le conflit du Sahara occidental et la déstabilisation de toute la région du Maghreb n’est pas encore prouvé. Les Sahraouis n’ont pas intérêt (comme d’autres mouvements de libérations nationales en Afrique et en Asie) à régionaliser le conflit, puisque jusqu’à présent le conflit est lié à la question réelle de la décolonisation. La supposition que la cause des sahraouis entrave la construction d’un Grand Maghreb n’est crédible, que dans l’esprit des manipulateurs politicards, vassaux des extra-libéraux, et de leurs « experts-chercheurs », notamment en France. Une minorité, comme le peuple sahraoui, ne peut entraver la volonté des trois ou cinq pays indépendants de la région qui peuvent entamer la conduite d’une construction structurelle régionale cohérente.
Le surgissement
du soulèvement pacifique aux territoires occupés n’est
pas une entrave à la négociation du Maroc avec le Front
Polisario, mais un rappel déterminant qui tire
irréversiblement vers la décolonisation du reste de nos
territoires et pousse à la vraie négociation entre le
Maroc et le Polisario. Cela, malgré l’acharnement injuste de
tous les segments de la force de l’ordre marocaine s’abattant surtout
sur des personnes vulnérables (hommes et femmes
âgés et mineurs) qui défendent leurs droits depuis
le 20 mai 2005, sans parler des disparus d’avant cette date.
Nous concluons à partir de ces éléments de réponses :
La présence de la cause sahraouie dans l’histoire contemporaine
du Maroc est divisée entre deux visions : Une approche
propagandiste qui nie l’existence des Sahraouis en tant que projet
réel, national et étatique et la deuxième
approche, pragmatique qui, elle, utilise constamment la question
sahraouie pour trouver une place dans la conjoncture politicienne
déterminée par le Palais royal.
Le combat sahraoui, en tant que projet nationaliste patriotique, de
combat pour la liberté et d’existence s’adapte à tous les
contextes politiques internationaux, régionaux.
Cette attitude montre la maturité du combat mené par les Sahraouis.
Actuellement la résistance nationale sahraouie dans les
territoires occupés est pleinement consciente de sa
volonté de réagir à toutes les injonctions
internationales et régionales et à celles qui sont
à l’intérieur du Maroc pour exprimer trois choses :
Le combat sahraoui est un combat national et pour l’indépendance totale du peuple et de l’Etat sahraoui ;
La démarche régionale de la concrétisation de
l’UMA doit respecter la volonté du peuple Sahraoui ;
La paix et la sécurité nationale sont le devoir de tous
les Etats et de tous les peuples. Le peuple sahraoui aux territoires
occupés est engagé à participer à la
concrétisation réelle à la paix régionale
et internationale dans cette région du monde.
La résistance civile aux territoires occupés est
consciente de participer à cette logique de paix, c’est pour
cela qu’elle mène un combat pacifique avec des moyens pacifiques
pour défendre le droit inaliénable des Sahraouis à
l’autodétermination et à la liberté.
Naâma Ould Abdi Ould Moussa (Asfari) Co-président du CORELSO
Ali Omar Yara, co-vice-président du CORELSO
Paris, le 13 décembre 2006