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Après une très longue inertie, le processus de mise en œuvre du plan de paix ONU/OUA sur le Sahara Occidental a redémarré, grâce à l'action conjuguée de Kofi Annan et de son Envoyé Personnel James Baker, couronnée par les accords de Houston, matérialisant l'engagement des deux parties (Front Polisario et Maroc) vis à vis du plan de règlement et de l'acceptation des résultats du référendum.
La Commission d'identification a entendu tous les requérants conformément aux accords de Houston. Le gros a été fait (opération inédite d'identification de près de 150.000 personnes) ; Le référendum est plus que jamais possible. L'essentiel du corps électoral est aujourd'hui connu. L'identification des 65.000 personnes des tribus contestées (dont moins de 1% figure dans le recensement espagnol de 1974) ne peut rien changer à ce constat des faits.
Mais le Maroc a peur du référendum et tout indique que, connaissant les résultats de l'identification, il fera tout pour le saborder : imposer au mépris des accords de Houston l'identification - voire carrément (on ne manque pas de culot à Rabat !) l'acceptation - des 65.000 personnes comme votants sans même être au préalable entendues par la Commission d'identification, empêcher le HCR de faire son travail dans le territoire en refusant l'ouverture du bureau du HCR à El-Aâiun, au Sahara Occidental, ne pas signer l'accord sur le statut des forces, continuer de bloquer à l'aéroport d 'El Aâiun les équipements de communication des unités de déminage, embêter les membres de la Minurso par le contrôle, les filatures et les tracasseries administratives. Contrairement à Rabat, qui est revenu sur les engagements pris avec le Front Polisario devant James Baker, le Front Polisario a pleinement coopéré avec la Minurso, James Baker et Kofi Annan. Les Sahraouis ont rempli tous leurs engagements pris à Houston et ont accepté sans hésitation ni réserve les propositions du Secrétaire général de l'ONU.Celles-ci ont été pourtant pensées et formulées sur la base de la satisfaction d'une exigence marocaine (identification des groupements de tribus H41, I61 et J51/52) à laquelle le Front Polisario s'est longuement opposée, estimant que les personnes appartenant à ces groupements de tribus n'ontpas de lien avec le Sahara Occidental.
Les accords de Houston ont réglé ce problème par une formule de compromis. Alors que la partie sahraouie a respecté celui-ci, le Maroc l'a ignoré totalement et a présenté à nouveau la même exigence, par ailleurs injustifiable. D'où les propositions du Secrétaire général de l'ONU, présentées en novembre dernier aux parties par son adjoint, le Français Bernard Millet.
L'acceptation de l'intégralité de ces "mesures" par le Sahraouis est sans doute une nouvelle concession. Ils veulent par-là témoigner, une fois de plus, de leur désir sincère de coopération avec l'ONU afin de déjouer les manœuvres marocaines d'obstruction du référendum et parachever le processus de décolonisation du Sahara Occidental. Le Secrétaire général a accueilli avec satisfaction la position sahraouie et le Conseil de sécurité, dans sa dernière résolution (1265/1998, du 17 décembre 1998) "s'est félicité que le F. Polisario ait officiellement accepté d'appliquer l'ensemble des mesures" proposées.
A l'instar de nombreux observateurs, les sahraouis ont cru que Rabat, une fois son exigence d'identification des tribus contestées satisfaite, se décidera à rompre avec son intransigeance et acceptera de coopérer avec l'ONU. Au contraire, il est en train de se livrer à une série de manœuvres dilatoires qui cachent mal ce qui n'est autre qu'un refus des propositions de l'ONU. Dans sa dernière résolution (17.12.1998), le Conseil de sécurité a donné à Rabat jusqu'au 31 janvier 1999 pour qu'elle accepte les mesures du Secrétaire Général. Mais il n'est pas exclu que Rabat passe outre cet ultimatum et confirme son refus aux propositions de l'ONU, exposant ainsi le processus de paix à un réel danger et le référendum s'en trouverait sérieusement menacé. Le Maroc sera l'unique responsable d'un tel échec. Va-t-il continuer de se sentir libre d'agir impunément ? La Communauté internationale restera-t-elle impuissante devant cet affront, mettant ainsi en cause sa crédibilité ?
Faute de référendum, et pour éviter le retour aux hostilités, les Sahraouis attendent de la communauté internationale une riposte conséquente : soit une sanction sévère contre Rabat, soit la reconnaissance de l'indépendance du Sahara Occidental.
Résolution sur le Sahara Occidental
Suite aux nouvelles tentatives marocaines de blocage du processus de mise en œuvre du plan de paix au Sahara Occidental, le Parlement européen a adopté, le 14 janvier 1999 à Strasbourg, la résolution suivante, qui se passe de tout commentaire :
Le parlement européen,
- vu ses résolutions et ses recommandations
précédentes sur la situation au Sahara Occidental,
- vu le rapport du Secrétaire général des
Nations unies du 11 décembre 1998 (S/1998/1160) et les
observations et recommandations qu'il contenait,
- vu les résolutions 1204 (1998) du 30 octobre 1998 et 1215
(1998) du 17 décembre 1998 du Conseil de
sécurité des Nations unies,
A. Observant que des progrès notables ont été réalisés au cours des derniers mois concernant le processus relatif au référendum au Sahara Occidental et que toutes les parties concernées par ce processus ont publiquement fait part de leur volonté d'accélérer le mouvement,
B. Craignant que, plus le temps passe, plus la perspective d'une concertation électorale s'éloigne,
C. constatant que toutes les mesures nécessaires pour assurer le rapatriement des réfugiés sahraouis appelés à voter ont été prises au plutôt et que le HCR a présenté à toutes les parties concernées un protocole à cette fin,
D. soulignant la nécessité que l'Union européenne apporte son soutien le plus large possible au Secrétaire général des Nations unies dans les efforts qu'il mène pour faire aboutir le processus de référendum au Sahara Occidental au plutôt,
E. considérant que l'Union européenne devrait continuer à soutenir le rôle de médiation joué par les Nations unies, et en particulier par son Secrétaire général, et maintenir l'aide humanitaire qu'elle fournit dans la région,
UE : Le référendum doit avoir lieu
La présidente du Conseil, Mme Ferrero-Waldner (ministre
autrichienne de la coopération), a assuré, dans une
déclaration faite le 16 décembre 1998, que l'UE
soutient pleinement le plan de paix ainsi que la MINURSO.
L'UE ne doit pas développer d'initiatives propres,
estime-t-elle, mais agir discrètement en coulisse. "En vue
d'éventuelles mesures de soutien de la part de l'Union, qui ne
sont pour l'instant pas encore définies", Mme Ferrero-Waldner
maintient un contact étroit avec M. Kofi
Annan.
Elle révèle qu'elle a proposé au
Secrétaire général de l'ONU soit de
l'accompagner soit d'accompagner James Baker dans une mission
commune. "Nous devons tout faire pour que le référendum
ait lieu", a-t-elle affirmé. Mais les chances pour que les
discussions de l'ONU avec le Maroc aboutissent jusqu'à fin
janvier sont faibles.
Mme Ferrero-Waldner dit être parfaitement consciente que le
Maroc cherche à retarder le processus, puisque le
résultat du vote sera très probablement en faveur de
l'indépendance (Arso).
Ould-Salek : Choisir entre le référendum et la RASD
Le ministre des affaires étrangères et de la coopération de la RASD a accusé le Maroc d'entraver le processus de règlement au Sahara Occidental et a appelé la communauté internationale à faire pression sur Rabat.
Lors d'une conférence de presse, tenue le 27 décembre 1998 à l'ambassade de la RASD à Alger, M. Mohamed-Salem Ould-Salek a indiqué que le Front Polisario espère que le Maroc acceptera les dernières propositions du Secrétaire général des Nations unies. Dans le cas contraire, "la communauté internationale doit reconnaître, sur les plans politique et diplomatique, la RASD".
"Si le Maroc continue de s'opposer à la volonté clairement affichée des Nations unies et à la légalité internationale", a-t-il poursuivi, le Conseil de sécurité est en devoir d'étudier les modalités de sanctions économiques et politiques à l'endroit du Maroc".
"Le peuple sahraoui, épris de paix et de justice, privilégie les voies pacifiques. Le cas échéant, nous serons contraints de recourir une nouvelle fois à la lutte de libération nationale. De ce qui en découlera sur le plan national, régional et international, seul le Maroc sera tenu pour responsable", a-t-il conclu (APS).
Le CICR visite des prisonniers marocains
Une délégation du CICR, comprenant un médecin, a visité, du 2 au 8 décembre 1998, 1'080 prisonniers marocains aux mains du Front Polisario. Le CICR a également vu les 84 personnes libérées en avril 1997, qui attendent toujours d'être rapatriées vers le Maroc (Arso).
Les rescapés de la prison marocaine revendiquent leurs droits
Dans son numéro 11, du 20 au 26 novembre 1998, le
périodique marocain As-Siyassa a révélé
que les 320 détenus sahraouis (50 à El Aâiun et
270 à Kalâat-Megouna), libérés par les
autorités marocaines en juin 1991 continuent d'endurer les
difficultés dans leur vie quotidienne (problèmes de
santé, de travail, etc.). 57 d'entre eux sont
décédés en prison ( 43 à
Kelâat-Megouna et les autres à El Aâiun). 13
autres (jusque' octobre 1998) sont décédés
après leur libération, à la suite de maladies
graves, conséquence de leurs mauvaises conditions de
détention : cancer, cœur, reins,gastrite. etc. Leur âge
varie de 12 à 100 ans ; 69 d'entre eux sont des femmes dont
l'âge varie de 12 à 70 ans. Ils comptent des familles
entières, à l'exemple des familles Leili et
Abdes-Samad, ainsi que deux handicapés mentaux.
Après de vaines tentatives auprès des autorités
à El Aâiun, un groupe de ces détenus
séjourne depuis le 29 août 1998 à Rabat dans le
but d'attirer l'attention des autorités marocaines sur leurs
conditions et réclamer leurs droits à l'indemnisation,
aux soins médicaux et au travail.
Un Sahraoui privé de passeport
Selon le périodique marocain Al-Ousbou, les autorités marocaines refusent de donner son passeport à un Sahraoui. "Voilà plus d'un an que Ahmida Jamaâ attend son passeport. Il s'est adressé au ministère des droits de l'Homme, au ministre de l'intérieur et à la Wilaya de Laâyoune. Seul le ministère des droits de l'Homme lui a répondu qu'il avait écrit au ministère de l'Intérieur en avril 98...". Ce que le journal n'a pas dit c'est que des milliers de Sahraouis sont privés de toute leur liberté !
Essonne : Soirée de solidarité avec le peuple sahraoui
En marge de son congrès, la Fédération de la CGT à l'Essonne organise le 20 janvier 1999 à Evry une soirée de solidarité avec le peuple sahraoui. Le représentant en Europe de l'Afapredesa (Association des familles et parents des disparus sahraouis), M. Daoud Khadir et le Secrétaire général de l'Association des Sahraouis en France, M. Mohamed M'barek assistent à cette soirée où un film sur le peuple sahraoui sera projeté, suivi de débat.
Le Havre : Lettre au Forum des progressistes européens
Profitant de la tenue du forum des progressistes européens (15.01.1999 à Paris), l'association "Un camion citerne pour les Sahraouis" a adressé aux participants le message suivant :
"Le 7 décembre 1998 devait se tenir au Sahara Occidental,
le référendum d'autodétermination, donnant enfin
aux populations sahraouies, aux termes du plan de paix des Nations
Unies et de l'OUA initié en 1991, la possibilité de
choisir entre l'indépendance ou l'intégration au
Maroc.
En dépit des efforts des Nations Unies, la date prévue
est à nouveau reportée, prolongeant d'une nouvelle
année l'exil d'un peuple qui vit cette situation depuis 23
ans.
Le Conseil de sécurité a, le 30 octobre 1998,
réaffirmé sa volonté de voir se dérouler
"un référendum libre, régulier et impartial en
vue de l'autodétermination du peuple du Sahara Occidental",
conformément aux accords de Houston signés en 1997 par
les représentants du Front Polisario et du
Maroc.
Le droit à l'autodétermination doit être
respecté, la confiance que le peuple sahraoui a placé
dans la communauté internationale ne doit pas être
vaine, il y va de l'avenir de ce peuple et de la paix au Maghreb.
Nous vous appelons donc à agir pour que le peuple sahraoui
choisisse son destin."
Du phénomène intégriste
Sous le titre : "Rabat garde le silence sur la
manifestation islamiste de soutien à l'Irak", Pedro
Canales écrit dans El Pais du 22.12. 98 :
"Les autorités marocaines ont décidé de garder
le silence sur la participation principale des organisations
islamistes dans la manifestation gigantesque du dimanche en
solidarité avec le peuple irakien. Les moyens de communication
officiels se sont limités à signaler qu' une
"manifestation populaire" spontanée convoquée par
"certains mouvements qui ne sont pas au courant de son interdiction"
s'est déroulée à Rabat.
Les partis démocratiques de la coalition du gouvernement
présidé par le socialiste Abderrahmane Youssoufi se
sont montrés gênés par l'absence notoire des
formations démocratiques dans la marche. A l'exception de la
Jeunesse socialiste et de certains membres de la centrale syndicale
CDT, le reste des formations de la coalition était absent.
Seul le journal communiste El Bayane a signalé que les
islamistes du Parti de la Justice et Développement et de la
Justice et Charité ont pris part à la
manifestation.
L'inusuelle absence de drapeaux et de portraits du roi et la
présence protagoniste des islamistes radicaux de Justice et
Charité ont suscité la nervosité des
autorités. Le cheikh Abdesslam Yassin continue de diriger,
depuis sa résidence de Salé où les
autorités l'ont enfermé, un mouvement qui
déclare posséder "des milliers de membres dans tous les
coins du pays".
De son côté, le journal marocain Al-Bayane écrit dans son édition du
9.1.1999, sous le titre "Les jeunes et la politique: une relation
ambiguë" (par Ahmed Moumnine) :
Les jeunes ne s'intéressent pas à la politique. Non pas
parce qu'ils ont été déçus mais, tout
simplement, parce qu'ils n'ont pas été suffisamment
encadrés. Le système éducatif y est pour
beaucoup. C'est aussi parce que les partis politiques ne se sont pas
totalement investis dans l'encadrement des jeunes. Une situation que
les islamistes se sont empressés de combler en encadrant les
jeunes... mais à leur manière... Les partis de la
Koutla avaient, à travers leur chabiba, essayé
d'investir les facultés. Au début des années 70,
ils ont réussi. A partir du début des années 80,
ils vont cependant lâcher prise. Laissant ainsi le terrain vide
à certains mouvements islamistes épaulés, dans
le temps, par les pouvoirs publics. Ces derniers, en revanche, ont
réussi dans leur mission d'encadrement... Résultat,
aujourd'hui, ils disposent d'une capacité de mobilisation des
jeunes qui dépasse toutes les prévisions. La preuve en
a été donnée tout récemment lors de la
marche de solidarité avec le peuple irakien.
Pour sa part, Al Mounaddama, un autre journal marocain, écrit, dans son numéro du 9.1.1999, sous le titre "La résidence forcée du cheikh Yassine entre dans la 9ème année" : On se demande vraiment quelle est la validité de la perpétuation de la résidence surveillée imposée à Abdeslam Yassine, alors que sa pensée, ses livres, ses idées et les choix de son Association connaissent un développement accru...
Dans un récent ouvrage, intitrulé "Monarchie et Islam politique au Maroc" (Ed. Presse de Sciences Po, 1999), le professeur marocain, Mohamed Tozy, aborde ainsi la question des islamistes au Maroc :
" Dans toutes les interviews qu'il a accordées aux
médias étrangers, le roi a eu tendance à
minimiser l'impact du mouvement islamiste au Maroc, en distinguant le
fondamentalisme (application stricte des règles de conduite de
l'islam et nécessité de ressourcement dans le corpus
originel [Coran et Sunna]), qu'il revendique, et l'intégrisme,
qu'il condamne. Cette attitude laisse peu de chance à
l'insertion officielle du mouvement : les autorités,
jusqu'à maintenant, n'ont toujours pas délivré
de récépissé de dépôt à
l'association Al Islam WA Tadjdid (ce qui équivaut à
une semi-reconnaissance) et ont refusé de reconnaître
l'association Al Adl wa L-Ihsan.
L'influence des islamistes se situent avant tout dans l'espace
privé. Leur présence sur la scène publique a eu
comme conséquences de banaliser la figure de l'islamiste et
même de la faire accepter comme partenaire possible par les
partis de l'opposition. Des rapprochements entre l'aile
fondamentaliste de l'Istiqlal et quelques groupes islamistes,
notamment ceux des villes moyennes (Safi, Tétouan…), sont
envisageables. Néanmoins, il ne faut pas oublier que les
structures clandestines sont aussi mal connues qu'actives.
L'activisme étudiant représente le côté
visible de cette nébuleuse. Le mouvement islamiste, notamment
Al-'Adl, voudrait profiter de l'espace d'opposition laissé par
la gauche pour l'occuper dans la perspective d'une alternance future.
Il a donc essayé de faire valoir ses droits politiques
à l'université".
Dans la presse marocaine
Al-Mounaddama (5.1.99)
L'embarras des petits rêves,
"Beaucoup de citoyens rêvent seulement de réaliser des
petites choses. Combien de jeunes aimeraient seulement avoir un
emploi leur assurant la stabilité, la possibilité de
fonder une famille et de vivre correctement ? Combien de gens sont
absorbés par les nécessités de l'instant au
point de ne pas avoir l'occasion de savoir ce que signifie l'avenir ?
La majorité du peuple vit ainsi".
Le Quotidien du Maroc (4.1.99)
Cherchez la source d'information !
"Les journalistes marocains sont les derniers à être
informés sur l'évolution de ce processus [Plan de paix
au Sahara Occidental], se voient supplantés par la presse
étrangère qui en sait plus qu'eux sur les derniers
développements de ce processus «On connaît depuis
longtemps l'animosité que voue la presse espagnole à
notre pays». Le journal "Le Monde" sous la plume de son "tu es
quoi" suit la même voie, non sans fustiger le Maroc de tous les
maux "qui sabordent le référendum".
Le Monde (30.12.98)
Sahara Occidental : l'échec du référendum, par Jean Pierre Tuquoi
Fin décembre, un point final aurait pu être mis
à un conflit aussi ancien qu'oublié : celui du Sahara
Occidental. Un référendum devait se tenir ce mois-ci
sous l'égide des Nations Unies et décider de l'avenir
définitif de cette ancienne colonie espagnole : soit ce
territoire désertique, aussi vaste que le Royaume-Uni et
peuplé de quelques centaines de milliers de Sahraouis, votait
pour l'indépendance, soit il se prononçait en faveur du
rattachement au royaume du Maroc.
L'année s'achève sans cette consultation. Le Front
Polisario, favorable à un Etat sahraoui, et les Marocains, qui
occupent l'essentiel du Sahara Occidental depuis la "marche verte" de
1975, faisant assaut de mauvaise foi, n'ont pas réussi
à se mettre d'accord sur les modalités du vote. Du
coup, les Nations Unies ont décidé de repousser d'un an
le scrutin. Il n'aura pas lieu avant décembre 1999 (…)
Rares sont même les diplomates occidentaux qui pensent qu'elle
aura lieu un jour. Pour une raison très simple : les
dirigeants marocains ne sont prêts à jouer la carte du
référendum que s'ils sont sûrs de le gagner. Tant
qu'ils n'auront pas la certitude absolue de l'emporter sur les
indépendantistes du Polisario, soutenus par l'Algérie,
ils entraveront sa tenue même si, dans leurs discours, ils
jurent le contraire.
"Que ce référendum ait lieu ou non, les provinces du
sud [le Sahara Occidental, selon la terminologie officielle]
resteront partie intégrante de l'unité territoriale du
Maroc", a redit vendredi 18 décembre le Premier ministre
'socialiste) marocain, Abderrahmane Youssoufi, à l'occasion de
son premier déplacement dans l'ancienne colonie espagnole. On
ne saura être plus clair, ni plus fermé à un
compromis.
Avec le soutien de partis politiques, le roi HassanII a
sacralisé "les provinces du sud" et leur rattachement à
la mère-patrie. Aucun journal, aucun responsable ne peut
impunément rompre "l'union sacrée" entretenue par la
classe politique depuis une génération, et mettre en
doute publiquement la "marocanité du Sahara Occidental".
L'opposant Abraham Serfaty le sait bien qui, pour avoir osé
préconiser "l'autodétermination" des populations
sahraouies, s'est vu interdire de retourner dans son pays natal
(…)
Depuis des années, le Maroc pratique donc un double jeu vis
à vis de la communauté internationale et des Nations
Unies. D'un côté, le royaume ne perd pas une occasion de
réaffirmer son attachement au référendum ; de
l'autre, il ne cesse d'en retarder la tenue en mettant à
profit la lourdeur du processus d'identification par les Nations
Unies des Sahraouis appelés à prendre part à ce
scrutin (…)
Redoutant de perdre le référendum, Rabat se montre de
plus en plus exigeant. Après avoir réclamé et
obtenu que les membres des tribus contestées soient
"identifiés" par les équipes des Nations Unies
installées au Sahara Occidental, des hommes politiques
marocains veulent désormais qu'ils participent "tous" à
la consultation (…)
Les Marocains savent bien qu'une telle exigence - contraire à
tous leurs engagements officiels - est inacceptable pour leur
adversaire du Polisario et que, dans ces conditions, ils sabordent le
référendum (...).
La Tribune (Mauritanie) 25.11.1998
Le Sahara Occidental et nous Par M.F. Ould
Oumère
L'affaire du Sahara Occidental pèse de plus en plus sur notre
devenir national. Il devient de jour en jour évident pour tout
le monde, qu'une solution définitive débouchant sur un
vainqueur et un vaincu (quelle que soit la forme de victoire…) est
inconcevable.
Depuis que les Américains se sont saisis du dossier (à
travers les Nations Unies), on sait qu'une Pax Americana
nécessairement complexe et probablement frustrante pour
chacune des parties sera imposée. La Mauritanie ne pourra
qu'être directement "concernée" par cette solution
quelle qu'elle soit.
Il est généralement admis que les conditions de la paix
se négocient et se construisent pendant la guerre. Il est donc
évident que l'impact de la résolution de ce conflit sur
la Mauritanie sera fonction de sa présence et de son
implication dans les négociations non seulement en cours, mais
aussi et surtout de la manière dont elle se sera
préparée à toutes les éventualités
(…).
Nouakchott Matin 18.11.1998
Au-delà de la question du Sahara : Quel rôle
sous-régional pour la Mauritanie
?
La visite que vient d'effectuer chez nous le Secrétaire
général de l'ONU, le ghanéen Kofi Annan rentre
dans le cadre des tentatives de la communauté internationale
de trouver une solution à la question du Sahara qui perdure
depuis la nuit des temps (…).
La Mauritanie joue admirablement bien le rôle de pays neutre
qu'elle s'est attribuée dans cette affaire du Sahara, non sans
oublier de se concerter avec les parties concernées (…). La
Mauritanie, ce bon élève de l'ONU se voit donc
solliciter pour jouer un rôle plusimportant dans la
sous-région et particulièrement dans le dossier du
Sahara dont elle s'est toujours affirmée d'une
neutralité indéniable.
La récente nomination de Mohamed El Hacen Ould Lebatt, ancien
ministre des affaires étrangères, pour s'occuper de ce
dossier dénote de la volonté de Ould Taya d'avoir un
"Monsieur Sahara" pour suivre de plus près ce délicat
problème (...)
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"Le processus ne peut pas échouer" déclare le ministre sahraoui de l'intérieur, Khalil Sid' Mhamed au jounal mauritanien Le Calame, édition du 21.12.1998
Bien que les observateurs sont de plus en plus sceptiques quant
aux chances de faire aboutir le processus de paix, en organisant un
référendum d'autodétermination au Sahara
Occidental avant décembre 1999, le SG des Nations Unies se
montre plutôt confiant dans son dernier rapport sur la question
. Les mesures proposées par Kofi Annan, lors de sa
dernière tournée dans la région, "ont
été officiellement acceptées par le Front
Polisario et ont bénéficié de l'appui sans
réserve de la Mauritanie et de l'Algérie", lit-on dans
le rapport. A propos de la réaction marocaine, le
Secrétaire général de l'ONU note que dans un
mémorandum daté du 20 novembre, "les autorités
marocaines cherchent à obtenir des précisions sur
certaines dispositions des projets de protocole avant de se prononcer
officiellement sur le train de mesures proposées par l'ONU".
Les Nations Unies viennent d'ailleurs de proroger, la semaine
dernière, le mandat de la Minurso, jusqu'au 31 janvier 1999,
conformément à une recommandation formulée par
Annan dans son rapport.
A propos de l'évolution de la situation au Sahara, nous avons
rencontré le ministre de l'intérieur sahraoui qui
effectue ces jours-ci une visite à Nouakchott.
Le Calame: quel est l'objet de votre visite en
Mauritanie?
El Khalil: Cette visite s'inscrit dans le cadre des
consultations périodiques entre nos deux pays. Notamment
après l'importante tournée que vient d'effectuer dans
la région le secrétaire général de l'ONU.
Comme vous le savez sans doute le Polisario a une fois encore
montré sa volonté quant à la recherche d'une
solution pacifique, en acceptant le nouveau plan de paix qu'a
proposé lors de cette tournée le Secrétaire
Général de l'ONU, y compris l'identification des 65.000
personnes qui ont été pourtant déjà
rejetées par les accords de Houston.
Le Calame: A l'issu de cette tournée, la tendance
était au pessimisme, y compris dans l'entourage même de
Kofi Annan. Est-ce le cas pour vous?
El Khalil : Certes la volonté du Maroc d'aller à
un référendum transparent et équitable reste
encore à prouver. Ce qu'il cherche, c'est plutôt un
référendum de confirmation, c'est pourquoi, il
multipliera les manœuvres. Malgré cela, je pense que des
étapes importantes on t été franchies.
Même si le chemin qui reste à parcourir est encore plus
long et plus décisif. Je pense aussi qu'étant
donné l'importance des changements intervenus depuis le
début de processus de paix à ce jour, la tendance est
aujourd'hui à la paix. Le monde d'aujourd'hui est devenu en
effet celui de la légalité, de la démocratie et
des Droits de l'Homme. les solution basées sur une approche
politique l'emporte de plus en plus sur l'option militaire.
Le Calame: Est-ce à dire qu'en cas d'échec du
processus de paix, vous ne reprendriez les armes?
El Khalil: D'abord je ne pense pas qu'un tel processus puisse
échouer, pour les raisons que j'ai évoqué. Si ,
malgré cela, la Communauté internationale se montre
incapable d'imposer des solutions de paix pour garantir la
stabilité, nous reprendrons alors les armes.
Le Calame: Pourtant beaucoup pensent que le processus est
en panne?
El Khalil: Le processus serait en panne si les deux parties
(et les parties intéressées)l'avaient toutes
rejetées. Mais une seule partie a encore des réserves
ou plus exactement des requêtes. Mais le Maroc finira par
accepter ce plan de paix. Il n'a pas le choix, car il a
déjà assez de problème à
l'intérieur.
Le Calame: On parle aussi d'une solution"
intermédiaire ". Qu'en est-il ?
El Khalil : Pour le moment en tout cas, la seule approche qui
est retenue est à laquelle ont déclaré leur
adhésion, c'est le référendum
d'autodétermination. Si celui-ci échoue , je ne vois
qu'une autre solution , le retour aux hostilités.
Le Calame: Le processus de paix de l'ONU, fait-il
l'unanimité au sein du Polisario?
El Khalil : Malgré d25 ans d'occupation et huit ans de
"ni guerre, ni paix" ce processus fait toujours l'unanimité.
Le Calame: On parle de l'existence de deux ails au sein du
Polisario, l'une modérée, et l'autre radicale…
El Khalil : Même dans le corps d'un même individu,
il y a toujours une gauche et une droite. C'est une
réalité dans toute société
démocratique comme la nôtre.
Le Calame: Au cas où le Maroc gagnerait le
référendum , où iront les combattants
sahraouis?ss
El Khalil : ils iront au Sahara Occidental accepteront le
verdict des urnes, à condition toutefois que celui-ci soit
l'émanation du peuple sahraoui et non de 30 millions de
marocains.
Le Calame: Le Polisario est-il aujourd'hui assez fort pour
reprendre la guerre?
El Khalil : Il est en tout cas plus fort qu'il ne
l'était en 1975.
Le Calame: Pensez-vous qu'après l'effondrement de
l'URSS et l'affaiblissement de Cuba, vous pouvez toujours mener la
guerre?
El Khalil : Le Polisario ne s'appuyait ni sur l'URSS ni sur
Cuba. En réalité, Cuba ne faisait que nous apporter son
concours pour l'éducation de nos enfants.
Le Calame: Sur qui vous appuyez-vous alors ?
El Khalil : Nous nous appuyons sur la même chose que les
Américains quand ils combattaient pour se libérer de la
Grande Bretagne. C'est à dire sur la force de notre peuple et
la justesse de notre cause.
Propos recueillis par MON