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ExcellenceMonsieur l'Ambassadeur Shambhu Ram Simkhada
Président de la 56éme session de la Commission des Droits de l'Homme des Nations Unies
Monsieur le Président,
L'Union des Juristes Sahraouis vous présente toutes ses félicitations chaleureuses pour votre éléction à la présidence de la commission des droits de l'homme, et à l'honneur de vous faire parvenir cette lettre concernant la situation qui prévaut dans les territoire occupés du Sahara Occidental.
Monsieur le président,
La 56ème session de la Commission des droits de l'homme , aura de nouveau, à se pencher sur la question du Sahara occidental sous le point 5 de l'ordre du jour "Droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et son application aux peuples assujettis à une domination coloniale ou étrangère". Aussi, les violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les disparitions arbitraires et la torture, corollaires manifestes et indissociables de la négation du droit des peuples sont également des thèmes de débat de la Commission en relation avec le sort imposé aux sahraouis qui attendent, depuis 1991, que les Nations Unies organisent la consultation populaire qui leur permettrait, enfin, de décider librement de leur destin.
La tenue du référendum d'autodétermination prévu par le plan de paix des Nations Unies, accepté en 1991 par le Maroc et le Front Polisario, se trouve de nouveau reportée. Depuis que la Commission d'identification a publié, le 17 janvier 2000, la liste provisoire des votants, le Maroc refuse implicitement de continuer à coopérer avec les Nations Unies . Cette liste (86.381 personnes) a constitué un revers indiscutable pour la politique expansionniste du Maroc et un camouflet pour ses prétentions dans la mesure où sur cette base, avalisée par les Nations Unies, l'issue du scrutin est inéluctablement l'indépendance.
Maintenant, le Maroc veut imposer une nouvelle révision des résultats obtenus en présentant en appel les dossiers de tous les réquérants (140.000) qui ont été déboutés par la Commission d'identification. Devant cette situation, le Conseil de sécurité, dans sa résolution 1292 (2000) du 29 février 2000, a tout en "réaffirmant son plein appui aux efforts poursuivis....pour faire appliquer le plan de règlement et les accords acceptés par les parties, concernant la tenue d'un référendum libre, régulier et impartial en vue de l'autodétermination du peuple sahraoui" fait, de nouveau, appel à l'ex-Secrétaire d'Etat américain, M. James Baker III, pour qu'il prenne "l'avis des parties" et "étudie les moyens de parvenir à un règlement rapide, durable et concerté de leur différent".
Le peuple saharoui qui a salué la victoire de la justice et de la raison, après 24 années d'occupation au Timor oriental, pensait que les Nations Unies allaient, avec la même détermination, clore l'un des derniers dossiers du déni du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes en organisant le référendum tant attendu. Le nouveau report de la consultation ne peut qu'ajouter aux souffrances déjà endurées par le peuple sahraoui dont une grande partie fait face, depuis 1975, aux contraintes de l'exil alors que le restant subit la politique de terreur imposée par l'occupant marocain dans les zones sous son contrôle.
Amnesty International, Human Rights Watch,Organisation Mondiale contre la Torture et d'autres organisations des droits de l'homme et les rares médias qui ont eu accès au territoire ont et continuent d'apporter des témoignages accablants sur le calvaire enduré par le peuple saharoui. La politique de répression, tortures, disparitions, enlèvements, jugements arbitraires a connu, depuis la 55ème session de la Commission des droits de l'homme, des proportions exceptionnelles. A titre d'exemple, les manifestations à EL-Aaiun durant les mois de septembre, octobre et novembre 1999 -après la mort du roi Hassan II- ont été matées dans le sang et les forces de l'ordre, appuyées par des miliciens marocains, comme encore au Timor oriental, ont entrepris une véritable chasse au sahraoui avec les résultats macabres que la presse a pu vérifier sur place. De même, depuis le début du mois de mars 2000 les manifestations contre l'occupant ont repris dans toutes les villes du Sahara occidental et singulièrement à Smara et El-Aaiun. La représsion a été une fois de plus sans discernement. Des dizaines de blessés, des dizaines d'arrestations, des biens et proprietés appartenant à des sahraouis ont été saccagés et pillés en signe de représailles par les forces auxiliaires et la police marocaines. L'Etat d'exeption a été imposé dans le territoire.
Monsieur le président,
Pour la première fois, les autorités marocaines d'ocupation encourage les colons à s'organiser en véritables milices de soutien à l'appareil repressif marocain contre les citoyens sahraouis. Cette situation ne cesse de s'agraver. Tout récemment, au bébut de mois de mars des centaines sahraouis se manifestent contre l'occupation marocaine ont été violemment réprimé. La répression a atteint une telle ampleur que le Conseil de Sécurite de l'ONU lui même a été saisi pour étudier les violents évenements qui se sont produits à El Aaiun et à Smara au territoires occupés au début du mois de mars. C'est la première fois dans l'histoire du conflit au Sahara Occidental que la répresion marocaine contre les citoyens sahraouis est abordée par le Conseil de Sécurité. Tout en se félicitant de cette initiative, l'Union des Juristes Sahraouis espère que le Conseil de Sécurité prenne les mésures pertinentes pour mettre un terme aux graves violations des droits humains au Sahara Occidental. Les Instances Internationales des Droits de l'Homme doivent créer le plus tôt possible un mécanisme de surveillance des droits de l'homme au Sahara Occidental, afin d'éviter la dégradation d'une situation dejà explosive. Ainsi ,en effet, depuis que le Maroc occupe une partie du territoire de la Republique Sahraouie en 1975, des milliers de personnes sahraouies ont été arbitrairement détenues et des centaines d'eux sont toujours disparues.
Monsieur le Président,
L'ONU permettra-t-elle qu'une telle situation perdure avec les conséquences qui en découlent? La Communauté internationale se pliera-t-elle à la volonté du plus fort pour imposer le fait accompli à un peuple assoiffé de paix et de justice? Combien de victimes seront encore necéssaires pour une réelle mobilisation contre l'agression dont souffre le peuple sahraoui?
Monsieur le Président,
Notre organisation voudrait attirer votre attention sur cette situation tragique (dossier de presse ci-joint), et fait appel à vous pour l'intensification de vos nobles efforts pour contraindre le Maroc à :
- Mettre un terme aux arrestations arbitraires ainsi qu'aux pratiques de disparitions et de torture au Sahara occidental.
- Lever l'état de siége dans les territoires occupés du Sahara occidental et garantir le libre accès à la presse, aux observateurs indépendants et aux ONGs.
- Fournir aux familles de plus de 60 sahraouis décédés dans les centres de détention secrets des certificats officiels de décés.
- Respecter strictement les conventions internationales qu'il a signé et ratifié.
En espérant que notre lettre retiendra toute votre attention, nous vous prions d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de notre haute considération.
Genève le : 26.03.00
Signé:Abba Salek El Haissen
Sécrétaire Général de l'UJS