[archives arso, publication papier 1992]

Reflets de l'actualité au Sahara Occidental  - avril 1992

2.4.  Mémorandum sahraoui
Dans un mémorandum  le Ministère des Affaires étrangères sahraoui fait le point de la situation. Il passe en revue les causes de la non application du plan de paix  jusqu’à ce jour, qu’il présente sous deux aspects. Le premier concerne  les violations et obstructions marocaines au plan de paix (implantations de population, violations du cessez-le-feu,  obstructions politiques et techniques des contingents de la MINURSO,  état de siège dans les zones occupées et  blocus de l’information). Le deuxième volet décrit les tentatives marocaines de modification du plan de paix  (manoeuvres pour fausser l’identification des votants).
Pour la partie sahraouie  le plan de paix,  tel qu’il a été accepté par les deux parties,  reste la seule solution au conflit. Elle  a fait des concessions importantes dans l’élaboration du plan, et dans sa mise en application  elle a toujours collaboré sincèrement avec la MINURSO. Pour terminer  la République sahraouie réaffirme sa pleine confiance dans l’ONU.


3.4.  Témoignage
Lors d’une assemblée de la société des officiers de Davos le Dr. Knüsli, membre de l’unité médicale de la MINURSO, a fait un compte-rendu de son séjour de septembre à fin novembre 91 au Sahara occidental. Evoquant le climat régnant sur place il a déclaré: « Nous avons remarqué rapidement qu’aux yeux des Marocains notre présence était indésirable. Tout d’abord l’ensemble de notre matériel est resté bloqué à Agadir. Ensuite nous avons été surveillés par la police secrète marocaine et même nos lettres ont été censurées. Les Marocains qui travaillaient avec nous étaient eux aussi surveillés. Je sais qu’à deux reprises des autochtones ont été arrêtés, parce qu’ils avaient eu des contacts avec nous». Le Dr Knüsli a l’impression que les autorités marocaines voulaient cacher à la population la présence des troupes de l’ONU. «Il y avait un blocus total de l’information», explique-t-il. Le médecin suisse ne croit plus à la possibilité d’un référendum au Sahara occidental, car le Maroc essaie par tous les moyens de l’empêcher (Davoser Zeitung, 3.4.92).

9.4.  Observateurs pour le référendum
Dans une réponse adressée à la Fédération mondiale de la jeunesse démocratique, le Représentant spécial pour le Sahara occidental envisage la possibilité d’inviter des groupes interessés, en particulier des ONG  reconnues par les Nations-unies, à envoyer des observateurs pour la campagne référendaire et le référendum lui-même.

9.4.  Visite du président Abdelaziz en Espagne
Poursuivant sa visite en Europe le secrétaire général du Front Polisario, M. Mohamed Abdelaziz, a été reçu pendant deux heures par le premier ministre espagnol Felipe González. A cette occasion le chef du gouvernement espagnol a réaffirmé le soutien de son pays au plan de paix de l’ONU.
Selon le correspondant de la NZZ à Madrid les déclarations du chef de l’état sahraoui ont été «modérées et conciliantes». «Abdelaziz exige uniquement la possibilité pour les Sahraouis d’exercer leur droit à l’autodétermination pendant deux jours - la durée du référendum prévu. Pour lui ce n’est pas le résultat qui est déterminant, mais que la votation puisse avoir lieu».
La visite du chef du Polisario vise à faire augmenter la pression internationale sur le Maroc, afin que ce pays accepte le plan de paix (NZZ, 10.4.92).

10.4.  Déclarations de M. Boutros-Ghali à Genève
Lors de sa conférence de presse le Secrétaire général de l’ONU a répondu à une question sur la situation au Sahara occidental. Il a exprimé son espoir d’un déblocage rapide de la situation. D’une part le nouveau représentant spécial pour le Sahara a commencé à New York ses contacts avec les protagonistes du conflit, et se rendra prochainement au Maroc et chez les Sahraouis. D’autre part les contacts que Boutros-Ghali a eu avec les deux parties lui font croire qu’il y a une volonté politique de trouver une solution.
En ce qui concerne le problème de l’identification des électeurs «c’est le nouveau représentant spécial qui va négocier avec les deux parties pour trouver une solution d’ordre politique». «Il faut faire tous les efforts nécessaires pour appliquer le plan de paix, et en même temps faire les efforts nécessaires pour obtenir l’accord des deux parties sur certaines interprétations à donner au plan de paix  là où il y a divergence. Il faut donc opérer sur les deux plans».

11.4.  Nouveau déplacement de population 
Les autorités marocaines ont repris les transferts de population vers le Sahara occidental. Selon le Ministère sahraoui de l’Information cette opération concerne des populations en provenance de la région de l’oued Draa. Il s’agit d’une nouvelle violation grave de l’esprit et de la lettre du plan de paix, à quelques jours de l’arrivée au Maroc du nouveau représentant spécial. En septembre 91 déjà, le Maroc avait transféré au Sahara occidental au moins 40’000 personnes supposées futurs électeurs, en contradiction flagrante avec le plan de paix, qui stipule clairement que les électeurs doivent être identifiés à leur lieu de résidence avant leur retour éventuel au Sahara occidental. Le F. Polisario exige l’arrêt immédiat de cette opération et le rapatriement de toutes les personnes transférées au Sahara occidental depuis le cessez-le-feu.

11.4.  Contre la raison d’état
Une délégation française comprenant Georges Montaron, rédacteur en chef de Témoignage Chrétien, s’est rendue dans les camps sahraouis dans le but «d’ouvrir les yeux à nos fins politiques, rendus aveugles par la raison d’Etat». Elle était porteuse de nombreux messages, notamment de Max Gallo, de l’amiral Sanguinetti, du général Gallois, de Paul Balta et Claudine Rulleau, ainsi que du Père Jean Toulat et de Jean Ferrat. Le reportage publié dans Témoignage Chrétien  du 11 avril a pour titre “Quand la France sacrifie les Sahraouis”.
Cette initiative fait suite à l’Appel aux Elus signé par des parlementaires et des élus locaux français publié le 29 février dans Le Monde. Cet Appel demande «au Conseil de Sécurité l’application immédiate et complète de la résolution 690»,  «au Ministère des Affaires étrangères de faire en sorte que la France intervienne fermement au sein du Conseil de Sécurité pour que celui-ci se donne les moyens de mettre en oeuvre sa résolution 690», et aux communes de France de se joindre au mouvement de solidarité pour les Sahraouis.

12.4.  Banque mondiale
La Banque Mondiale accordera au Maroc une aide financière de 275 millions de dollars pour la période 1992-93. Selon le vice-président de la Banque Mondiale le Maroc a reçu depuis 1962 six milliards de dollars de prêts. Il a félicité le gouvernement marocain pour ses «performances» et ajouté qu’une libéralisation encore plus rapide du commerce extérieur et du secteur financier sera nécessaire. M. Koch-Weser  a estimé que la situation sociale au Maroc demeurait préoccupante, affirmant que les plans d’ajustement ont freiné les progrès sociaux. (agences)

14.4.  Visite du président sahraoui en Espagne
Après l’Andalousie, où il a été reçu à Córdoba et Puerto Real par les autorités provinciales et locales, le président sahraoui Mohamed Abdelaziz a visité les Iles Canaries.  A son arrivée il a été reçu par les maires des nombreuses localités jumelées avec les villes sahraouies, par les autorités de Las Palmas et par la communauté sahraouie de cette ville. Le président sahraoui a eu des entretiens avec les autorités municipales et provinciales canariennes.
Dans son éditorial du 15 avril consacré à cette visite, El País conclut: «Pour l’Espagne, le maintien de relations d’amitié avec le Maroc est une nécessité essentielle de sa politique extérieure. (...) Cependant, en ce qui concerne le problème du Sahara, il faut bien déplorer l’attitude du Maroc, qui entrave une mission de l’ONU appuyée par l’immense majorité des pays du monde. L’Espagne, pour avoir été la puissance coloniale de ce territoire, a toujours soutenu les efforts de l’ONU en vue de l’organisation d’une consultation impartiale du peuple sahraoui. Actuellement la diplomatie espagnole doit maintenir cette attitude (...). Il faut espérer que le nouveau secrétaire général de l’ONU prenne les choses en main et fasse comprendre au Maroc qu’il doit tenir les engagements qu’il a contractés et mettre fin à ses manoeuvres dilatoires. L’ONU est engagée dans ce problème [du Sahara] et doit aller de l’avant».

16.4.  Violations du cessez-le-feu
Dans une lettre adressée au Représentant spécial pour le Sahara occidental, M. S. Yaqoub-Khan, le coordinateur sahraoui avec la MINURSO, M. Bachir Sayed signale que deux avions marocains ont survolé, le 14 avril, le sud du territoire contrôlé par le Front Polisario. M. Bachir Sayed rend attentif au «danger que constituerait, tant pour l’application du Plan de paix que pour la crédibilité de l’ONU, la poursuite de l’indifférence avec laquelle celle-ci répondait, dans le passé, à l’attitude négative de la partie marocaine».

16.4.  Paroles d’opposants marocains
Dans VO-Réalités (Genève) l’opposant marocain Moumen Diouri déclare au sujet de la guerre du Sahara occidental: «Elle a déjà coûté dix-sept milliards de dollars et fait plus de douze mille morts marocains et des milliers de Sahraouis. C’est abominable. (...) C’est un crime contre l’humanité. C’est une guerre fratricide causée par la volonté d’un seul homme: Hassan II». A la question “Le Plan de paix est-il encore viable ?” M. Diouri répond: «Absolument. (...) Quoiqu’il arrive à la fin de cette guerre, ce sera la fin de Hassan II. L’armée va rentrer au centre du Maroc  et demander des comptes».
Dans L’ Autre Journal  (Paris, nº23, avril 1992) Abraham Serfaty «souhaite que le Conseil de Sécurité se décide enfin à faire appliquer sans hésitation la résolution 690 [d’avril 1991], que le référendum projeté ait lieu rapidement».

17.4.  Appel au gouvernement belge
Dans une résolution concernant la question du Sahara occidental, adoptée le 8 avril, la Ligue belge des Droits de l’Homme demande au gouvernement belge d’user «de toute son influence afin que le Plan de paix soit mis en oeuvre», et de «plaider au Conseil de Sécurité [la Belgique en est membre] pour que des mesures soient prises à l’encontre de ceux qui retardent la mise en oeuvre du Plan de paix».

17.4.  Le Représentant spécial se rend dans la région
M. Yaqoub Khan, le nouveau représentant spécial pour le Sahara occidental, arrivera lundi 20 avril au Maroc. Il se rendra ensuite au Sahara occidental occupé, en Mauritanie et en Algérie, où il rencontrera les représentants du Front Polisario.

17.4.  Déclaration du président algérien
Dans un entretien publié par “Algérie-Actualité” le président algérien Mohamed Boudiaf se prononce «pour une solution politique entre les parties concernées avant le référendum, ce qui ferait l’économie  d’une possible confrontation plus élargie» (agences).

18.4.  Interview du président sahraoui
La Tribune de Genève publie une interview de Mohamed Abdelaziz réalisée par Michel Eggs. A la question de savoir si un référendum est encore possible, le président sahraoui répond qu’il en est sûr, et  que ce référendum aura lieu aujourd’hui ou demain. Le seul terrain d’entente possible, selon lui, c’est le plan de paix de l’ONU: «Une autonomie, une fédération ou une confédération pour régler la question du Sahara occidental, cela n’entre pas en ligne de compte. Il n’y a que deux possibilités, l’indépendance ou l’intégration au Maroc, choisie librement par les Sahraouis. (...) La situation est claire: ou Hassan II accepte  d’ici fin mai d’appliquer le plan de paix tel qu’il a été décidé, ou alors il faut dénoncer le Maroc, imposer des pressions politiques et un boycottage économique».

19.4.  Le président sahraoui à Alger
Lors d’une conférence de presse tenue à Alger après son retour d’un périple qui l’a conduit à New-York, en Allemagne et en Espagne, M. Mohamed Abdelaziz a réaffirmé: «Nous refusons toute négociation en dehors du plan de paix adopté par l’ONU». Il a précisé en ajoutant: «Nous ne pouvons accepter une autre forme de compromis que ce plan onusien, soutenu par l’ensemble de la communauté internationale, et que le Maroc tente de dévier, lui qui l’avait pourtant accepté au départ. L’échec du plan de paix sera aussi  l’échec des principes de droit international et l’effondrement de l’autorité des Nations unies».

21.4.  “Démocratisation” au Maroc
Le roi Hassan II a donné au parlement  jusqu’au 4 mai pour  préparer de nouvelles lois  électorales  applicables lors des prochaines élections législatives, prévues pour octobre. Ce qui signifie que les partis  politiques ont à peine deux semaines pour développer des propositions pour que les élections se déroulent “proprement”, selon les déclarations de leurs  leaders... (agences).

22.4.  Violation du cessez-le-feu
L’armée marocaine a procédé à des travaux de génie sur le “mur de défense” dans la région d’Amgala,  selon le Ministère sahraoui de l’Information.

26-27.4.  Première mission du nouveau représentant spécial pour le Sahara
M. Yakoub Khan rencontrera les responsables sahraouis dans les camps de réfugiés près de Tindouf. Il gagnera cette oasis en provenance de Mauritanie, après s’être entretenu avec le roi Hassan II au Maroc et avoir visité les territoires occupés. Il arrivera ensuite le 28 avril à Genève pour rendre compte de sa  première mission à M. Boutros-Ghali.

26.4.  Solidarité
Arrivée dans les camps de réfugiés au sud de Tindouf de deux caravanes de solidarité. L’une vient de la région de Valence (Espagne), l’autre de Grande-Bretagne.

27.4.  Mission du représentant spécial
Poursuivant sa tournée dans la région le représentant spécial a visité Tifariti dans les zones occupées par le Polisario et s’est entretenu avec Brahim Ghali, ex-ministre de la Défense et chef de la 2è région militaire.
Le président Mohamed Abdelaziz a reçu le lendemain le représentant spécial. Celui-ci, dans une déclaration à la presse, a réaffirmé la détermination de l’ONU à «déployer des efforts sérieux pour débloquer la situation». M. Yakoub Khan a assuré avoir reçu l’appui des deux parties pour l’aider à sortir de l’impasse. Il a aussi fait une brève déclaration devant le Conseil national sahraoui (législatif),  avant de discuter avec certains de ses membres.
M. Yakoub Khan devait ensuite se rendre à Alger pour terminer son périple à Genève le 30.4., où il rencontrera les responsables du  HCR et du CICR. Au cours de la première semaine de mai il discutera avec  le secrétaire général à New York pour décider des prochaines étapes.

29.4.  Commentaires sahraouis
Dans une conférence de presse suite à sa rencontre avec M. Yakoub Khan M. Bachir Sayed, coordinateur sahraoui avec la MINURSO, a demandé «le déploiement des forces de l’ONU sur la frontière nord du Sahara occidental, afin que cessent les violations du cessez-le-feu et le transfert de populations, et le déploiement de la police civile onusienne dans les villes occupées du Sahara pour créer les conditions propices au rapatriement des réfugiés». Sur les problèmes empêchant la progression du plan M. Sayed a déclaré: «Nous sommes prêts à faire des pas et à contribuer à leur règlement, mais nous exigeons que l’autre partie fasse exactement le même nombre de pas».
Sur la question de l’identification des électeurs le responsable sahraoui a indiqué qu’il pouvait y avoir un compromis pour le règlement de la marge d’erreur du recensement: «Les problèmes créés par le Maroc ne sont pas insurmontables (...) La question n’est pas de se mettre d’accord, mais d’amener le Maroc à respecter ses engagements».
Concernant la visite du représentant spécial  il a indiqué qu’«il ne s’agit que d’une première prise de contact, M. Yakoub Khan n’ayant avec lui aucun ordre du jour précis». Il a encore ajouté qu’un compromis pourrait être dégagé, afin de sortir de l’impasse actuelle, « à condition que les deux parties en conflit acceptent de faire des concessions».

29.4.  Maroc: préparation des élections législatives
Le roi Hassan II a annoncé la création d’une «commission d’arbitrage» chargée de veiller à la préparation des élections, commission qu’il présidera lui-même et qui sera composée des responsables de tous les partis politiques ainsi que des ministres de la justice et de l’intérieur.  Une autre commission, la «commission politique»,  sera formée des dirigeants de tous les partis et chargée de superviser les diverses consultations prévues d’ici l’automne.
  D’autre part les trois syndicats d’opposition ont annulé leurs manifestations du 1er mai pour protester contre des restrictions imposées par les autorités à un défilé prévu à Casablanca (agences).

29.4.  CEE-Maghreb
Le commissaire européen responsable de la politique méditerranéenne de la CEE, M. Abel Matutes, a présenté une proposition sur l’avenir des relations entre la Communauté et les pays du Maghreb. Les futurs accords euro-maghrébins reposeraient sur quatres piliers: un dialogue politique, une coopération politique, la création d’une zone de libre-échange et une coopération financière. Le document présenté par M. Matutes met l’accent sur la question des droits de l’homme :«La Commission entend mettre sur pied un programme de promotion des droits de l’homme en Méditerranée qui laissera l’initiative de ses actions aux associations locales actives dans ce domaine» (agences).
   
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