[archives arso, publication papier 1992]
Reflets de l'actualité au Sahara Occidental - mars 19922.3. Maroc-CEE
Les ministres des Affaires étrangères des Douze ont
confirmé qu’ils envisageaient un partenariat avec le Maroc
basé sur un accord de libre-échange, une assistance
économique et l’instauration d’un dialogue politique. Le
commissaire européen chargé des questions
méditerranéennes se rendra au Maroc les 11 et 12 mars
pour entamer des discussions en ce sens (agences).
2.3. Interview du roi
Dans une interview accordée au «New York Times» le
souverain marocain a déclaré qu’il organiserait les
élections législatives avant le 9 octobre prochain
«sur tout le territoire marocain, y compris le Sahara
occidental», si l’ONU n’organisait pas un
référendum en mai ou juin prochain. Il a ajouté
qu’il comptait que les Nations unies s’en tiendraient aux
procédures arrêtées par le Conseil de
sécurité fin 1991 et qu’ il n’avait pas demandé au
Secrétaire général de l’ONU un nouveau rapport sur
le calendrier du référendum et la composition du corps
électoral. Il a même affirmé qu’il ne
reconnaîtrait pas un nouveau rapport et que, si M. Boutros-Ghali
rouvrait la question du Sahara occidental, «toutes les
résolutions du Conseil de sécurité seraient
remises en question» (agences).
3.3. Révision constitutionnelle au Maroc
Le roi Hassan II a annoncé, à l’occasion du trente et
unième anniversaire de son accession au trône, une
révision de la Constitution dans la perspective des prochaines
élections législatives. Cette révision de fassade
est destinée à faire patienter
l’«opposition», qui a déposé à la
mi-février une demande de convocation extraordinaire du
Parlement afin de procéder à une réforme des lois
électorales. L’opposition souhaite que les élections
législatives aient lieu indépendamment du
référendum au Sahara occidental (agences).
12.3.1992, 10.30 h. Hôtel Limmat, Riedersaal, Limmatstr. 118, Zürich.
CONFERENCE DE PRESSE du ministre des Affaires étrangères de la RASD, M. Ould Salek.
La venue du ministre sahraoui en Suisse fait suite à ses visites en Grande-Bretagne et en Suède.
Position de l’Algérie
La presse algérienne fait état des réactions des
autorités de ce pays après les affirmations
publiées au Maroc (Reflets du 23.2.) et reprises en Suisse,
à propos d’un changement de l’attitude algérienne par
rapport au problème sahraoui. Le ministre de la Communication et
de la Culture a précisé que «l’Algérie n’a
pas de position nouvelle sur le Sahara occidental, mais il existe une
volonté politique du nouveau pouvoir de résoudre la
question dans les plus brefs délais».
Le ministre des Affaires étrangères a
déclaré pour sa part qu’ «à l’initiative du
président Boudiaf des discussions vont s’engager avec les deux
parties pour essayer de voir comment on peut (...) avancer vers la
solution de ce problème» (Le Matin, Alger, 7.3.92). M.
Boudiaf lui-même a estimé que «le plan de l’ONU est
susceptible de régler ce conflit» (Es-Salam, Alger,
5.3.92). Par ailleurs le président du HCE précisait:
«La question sahraouie demeure un obstacle pour la construction
du Maghreb arabe. (...) A part le référendum je ne vois
pas d’autres solutions et je crois que cela est possible si on pouvait
rétablir la confiance entre l’Algérie, le Maroc et les
frères sahraouis» (Roz el Youcef, Le Caire, 15.3.92).
9.3. Transfuges
Selon un journal marocain sept membres du Front Polisario,
présentés comme cadres militaires, auraient
“regagné” le Maroc (L’Opinion, Rabat).
9.3. Seconde “marche verte”
Un journal espagnol apporte de nouvelles précisions sur le
transfert de population opéré par les autorités
marocaines au Sahara occidental. Selon El Siglo le Maroc a
établi au Sahara occidental des «centres
d’émigrants», principalement autour des six
agglomérations les plus importantes et transféré
180’000 Marocains soi-disant d’origine sahraouie pour participer au
référendum.
Deux journalistes américains ont également
visité les zones occupées du Sahara occidental et
publiés leurs analyses dans The International Herald Tribune,
29.2.92, et dans The Washington Post, 14.3.92.
19.3. Diplomatie
Des représentants d’organisations sahraouies sont en visite en
Europe. Le secrétaire général de l’Union de la
Jeunesse se trouve en Italie, une délégation de l’Union
des Femmes en Allemagne. Le président sahraoui Mohamed Abdelaziz
est attendu prochainement dans ce pays.
20.3. Violations du cessez-le-feu
Selon le Ministère de l’Information sahraoui un avion militaire
marocain a survolé le Sahara occidental sous contrôle
sahraoui les 19 et 20.3. Le 20.3. deux autres avions de
combat marocains ont récidivé dans un autre secteur.
Selon la même source l’armée marocaine a
procédé à des travaux d’ amélioration de
ses positions les 9 et 12 mars.
24.3. Approbation du rapport de M. Boutros-Ghali
Le Conseil de Sécurité a approuvé à
l’unanimité le rapport du secrétaire
général consacré au Sahara occidental.
24.3. Nouveau représentant spécial
La nomination du nouveau représentant spécial pour
le Sahara occidental, en la personne de M. S. Yaqoub-Khan, a
été accueillie de façon mitigée par le
Front Polisario, qui avait récusé sa candidature
début mars. Le président sahraoui Abdelaziz a cependant
déclaré au cours d’une visite en Allemagne,
«être prêt à collaborer [avec le diplomate
pakistanais] malgré ses bonnes relations avec le
Maroc».
L’Association française des Amis de la RASD s’est
«étonnée», dans un communiqué, de
cette nomination décrétée «contre la
volonté clairement exprimée (...) du Front
Polisario».
Le nouveau représentant spécial adjoint est de nationalité suédoise.
28.3. Le président de la RASD en visite en Allemagne
Dans une intervention lors du colloque consacré au “Nouvel ordre
mondial sur le modèle de la guerre au Sahara occidental”
le secrétaire général du Front Polisario a
analysé les causes de l’échec du plan de paix onusien.
«Le Maroc a bloqué le processus au moment où son
gouvernement a compris qu’il allait perdre le référendum.
C’est alors qu’il a déposé des listes
supplémentaires de votants, violé le cessez-le-feu et
engagé des manoeuvres dilatoires incessantes. Au départ
c’est le Maroc qui a proposé le recensement de 1974 comme base
du corps électoral, alors que nous y étions
opposés. »
Le plan est voué à l’échec, le Maroc n’en veut
pas: «Le Maroc devrait dire clairement qu’on le laisse gagner le
référendum ou qu’il n’y en aura pas». Ailleurs le
problème a été résolu soit par des
pressions économiques (sur l’Afrique du Sud dans le cas de la
Namibie), soit par une intervention militaire (contre l’Irak dans le
cas du Koweit). «Il ne devrait pas y avoir deux sortes de droit
international»,a ajouté le président, avant
d’appeler les forces politiques européennes à
«faire évoluer la situation au Sahara occidental avant la
fin mai». «Le Maroc doit accepter et respecter le
plan de paix».
M. Mohamed Abdelaziz poursuit sa visite en Europe en se rendant ces prochains jours en Espagne.
28.3. Conférence de presse à Cologne
Dans une conférence de presse le président sahraoui a
déclaré avoir eu en Allemagne des discussions au
ministère des Affaires étrangères et avec des
représentants de partis politiques. Interrogé sur les
résultats de ses consultations il a ajouté que
«tous les gouvernements sont d’accord sur le plan de paix, mais
le problème c’est son application». «L’ONU et les
pays européens doivent faire pression sur le Maroc. Si le plan
de l’ONU ne peut être débloqué avant la fin mai, la
seule alternative qui nous reste c’est la reprise de la guerre».
28.3. Colloque
Des spécialistes du droit international, des politologues, des
journalistes ainsi que des membres d’oeuvres d’entraide ont
analysé, lors de ce colloque tenu à Cologne, l’influence
des grandes puissances sur la genèse et l’évolution du
conflit marocco-sahraoui, ainsi que ses incidences sur le régime
de Hassan II. Selon son issue le règlement du conflit pourrait
mettre en danger son régime. C’est pourquoi les deux
puissances citées appuient une solution favorable au Maroc.
Mais comme l’a relevé Werner Ruf, politologue, «la
victoire du Maroc aurait des conséquences négatives
importantes. Elle nuirait gravement à la
crédibilité de l’ONU, et contribuerait à
entretenir une tension persistante dans la région. Dans un
Grand-Maroc ayant absorbé le Sahara occidental la
minorité sahraouie bafouée serait source de tensions et
pourrait même devenir le ferment d’une nouvelle résistance
avec, à terme, la chute de la monarchie. Donc même si le
problème se termine comme le veulent la France et les USA par
l’annexion du Sahara occidental par le Maroc, rien n’est
résolu et de nouveaux problèmes apparaîtront
rapidement. D’où la nécessité d’imposer la seule
solution qui peut créer une stabilité durable dans la
région, celle du respect du droit à
l’autodétermination du peuple sahraoui.»
29.3. Témoignage
Elisabeth Bäschlin Roques, présidente du SUKS
(Schweizerisches Unterstützungskomitee für die
Sahrauis), a séjourné dans les camps de
réfugiés près de Tindouf du 2 au 14 mars 1992.
«Le quotidien a repris le dessus dans les camps.
Après une phase où tous croyaient à
l’imminence du départ pour le Sahara occidental
suivit une période de grande déception et de
découragement profond en raison du report sine die de la date du
référendum. Les Sahraouis semblent maintenant avoir
retrouvé courage et confiance. Les habitants des camps ont
repris leur travail dans les ateliers et cultivent leurs jardins.
Le 1er mars les élèves des deux internats qui jusque
là avaient provisoirement suivi des cours dans les écoles
de wilaya sont retournés dans leurs établissements.
Les Sahraouis, malgré tout, semblent garder l’espoir que la
communauté internationale les aidera à réaliser le
référendum d’autodétermination. Ils continuent, me
semble-t-il, à avoir confiance en l’ONU (“L’ONU a voté le
plan de paix, donc elle veillera à son application!”).
Mais ils ont compris qu’il fallait se munir de patience. J’ai
rencontré dans les camps un climat d’attente confiante.
La famille de Ghejmoula Ebbi
J’avais rencontré Ghejmoula, l’une des transfuges
présentés en février dernier par l’ambassade du
Maroc à la presse suisse, à l’époque où
elle était responsable de l’Union des femmes sahraouies. Depuis
son passage du côté marocain, elle accuse le Polisario de
retenir sa famille prisonnière dans les camps. Elle a même
dénoncé ce fait devant la Commission des droits de
l’homme de l’ONU à Genève.
C’est pourquoi, lors de mon séjour, je suis allée rendre visite à la famille Ebbi.
Mohamed Mehdi Ebbi et sa famille habitent une tente dans la wilaya d’El
Aioun. J’y ai bu du thé avec sa femme Selma, sa petite fille
Fatimatou, appelée “Bicha”, la demi-soeur de Ghejmoula, un
cousin germain du père et plusieurs voisins et voisines. Nous
avons discuté, parlé de Ghejmoula et des transfuges. A la
fin j’ai pu acheter une melfah du stock du père Ebbi, qui est
commerçant et possède sa propre Landrover. Ce
jour-là, il s’était rendu à Tindouf , ville
algérienne proche, pour affaires, muni d’un laisser-passer
établi par le POLISARIO. Deux jours avant ma visite, il
était rentré d’un voyage en Mauritanie où il
avait acheté de la marchandise pour la revendre dans les oasis
des territoires libérés, à Tindouf-ville et dans
les camps. Cet homme ne donne pas l’impression d’être prisonnier,
au contraire, il semble circuler très librement dans la
région et s’occuper de son commerce. »
Pour plus d’informations et documentation photographique s’adresser au SUKS, case postale 2331, 3001 Berne.
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