NATIONS UNIES

Conseil de sécurité

Distr. GÉNÉRALE

S/1999/875
12 août 99

FRANÇAIS

ORIGINAL : ANGLAIS


RAPPORT DU SECRETAIRE GENERAL SUR LA SITUATION CONCERNANT LE SAHARA OCCIDENTAL

I.INTRODUCTION

1. Le présent rapport est soumis comme suite à la résolution 1238 (1999) du Conseil de sécurité en date du 13 mai 1999, par laquelle le Conseil a prorogé le mandat de la Mission des Nations Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO) jusqu'au 14 septembre 1999, et m'a prié de lui rendre compte tous les 45 jours des faits nouveaux importants concernant l'application du Plan de règlement pour le Sahara occidental (S/21360 et S/22464 et corr.1), et des accords conclus entre les parties, le Royaume du Maroc et le Front populaire pour la libération de Saguia El Hamra et du Rio de Oro (Front POLISARIO), sous les auspices de mon Envoyé personnel, M. James A. Baker III (S/1997/742, annexe I à III) et de l'ensemble de mesures des Nations Unies (S/1999/483/add.1). Le rapport décrit les faits nouveaux intervenus depuis mon précédent rapport au Conseil de sécurité, en date du 25 juin 1999 (S/1999/721).

II FAITS NOUVEAUX INTERVENUS DURANT LA PERIODE EXAMINEE

2. Mon Représentant spécial pour le Sahara occidental, M. William Eagleton, a poursuivi les consultations avec les deux parties et avec les Etats membres intéressés pour assurer l'application du Plan de règlement et des principales dispositions de l'ensemble de mesures des Nations Unies. Les travaux ont porté sur l'engagement des recours dans le cas des requérants déjà identifiés et l'identification simultanée des requérants restant appartenant aux groupements tribaux H41, H61 et J51/52. Ils ont englobé également les préparatifs nécessaires pour le retour des réfugiés et des autres Sahraouis résidant en dehors du territoire qui remplissent les conditions pour participer au vote, en compagnie de leur famille immédiate. Le Maroc et le Front POLISARIO se sont déclarés l'un et l'autre satisfaits que le calendrier envisagé dans l'ensemble de mesures ait été respecté, à savoir que le processus d'identification ait repris le 15 juin, que la première partie de la liste provisoire des personnes habilitées à participer au vote ait été publiée et que la procédure de recours ait commencé le 15 juillet. Les deux parties ont exprimé également un optimisme prudent au sujet des prochaines étapes dans l'application du plan.

3. La période examinée a été endeuillée par le décès de S.M. le Roi Hassan II, le 23 juillet, qui a mis brutalement fin à un règne remarquable de près de 40 ans. J'ai assisté aux obsèques du Roi Hassan II le 25 juillet et rencontré brièvement S.M. le Roi Mohammed VI et les hauts responsables marocains, le Président algérien, M. Abdelaziz Bouteflika et mon Envoyé personnel et mon Représentant spécial durant mon séjour à Rabat. S.M. le Roi Mohammed VI, dans son discours du trône le 30 juillet, a réaffirmé son attachement au maintien de l'intégrité territoriale du Maroc par la tenue d'un référendum "de confirmation" sous les auspices de l'Organisation des Nations Unies. Le même jour, le Président Bouteflika a réaffirmé que la question du Sahara occidental devait être réglée par l'Organisation des Nations Unies et dans le cadre des Accords de Houston, tandis que la question des relations bilatérales entre l'Algérie et le Maroc devait être réglée par les deux pays eux-mêmes.

4. Lors d'une réunion avec mon Représentant spécial et avec le Président de la Commission d'identification, tenue à Rabat le 31 juillet, le Ministre de l'intérieur du Maroc, M. Driss Basri, a confirmé que son pays était décidé à faire en sorte que le référendum ait lieu ; il a invité toutes les parties prenantes à accélérer les préparatifs pour le rapatriement des réfugiés sahraouis et demandé au haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés(HCR) de renforcer les activités à cet effet. Le ministre a également fait part de sa préoccupation au sujet des résultats de la deuxième phase de l'opération d'identification et de ce qu'il estime être ses conditions de qualification restrictives.

A. Identification et recours

5. Durant la période examinée, les opérations d'identification ont continué à Laayoune, dans le territoire, et à Tan-Tan et Goulimime, dans le sud du Maroc. Deux nouveaux centres d'identification ont été ouverts, l'un à Assa, dans le sud du Maroc, le 5 juillet 1999, l'autre à Nouadhibou, en Mauritanie, le 19 juillet. Le 24 juillet, la MINURSO a suspendu les opérations d'identification et de recours pour une semaine, en signe de respect pour le roi défunt. Au 23 juillet 1999, 9.674 demandeurs individuels appartenant aux groupements tribaux H41, H61 et J51/52 avaient été interviewés depuis la reprise des activités d'identification, le 15 juin 1999. Le nombre des demandeurs interviewés depuis le lancement du processus d'identification, le 28 août 1994, atteint désormais 155.923.

6. A Rabat, le 9 juillet, mon Représentant spécial a rencontré le Ministre de l'intérieur, M. Basri, qui a exprimé à nouveau la préoccupation du Maroc au sujet des milliers de demandeurs éliminés au stade du réexamen par la Commission d'identification, au fur et à mesure du processus d'identification. Dans ma réponse du 9 juillet 1999 adressée au Ministre marocain des affaires étrangères, M. Mohamed Benaïssa, qui avait fait part des mêmes préoccupations dans une lettre datée du 14 mai, j'ai souligné que ces demandeurs auraient la pleine possibilité de contester la décision et d'obtenir gain de cause suivant la procédure de recours s'il était établi que leur nom avait été retiré sans motif légitime de la liste provisoire des personnes habilitées à participer au vote. J'ai également expliqué dans ma lettre les procédures de réexamen qui peuvent aboutir à l'infirmation de la décision initiale, prise par le membre de la Commission d'identification qui a procédé à l'interview, d'inclure les demandeurs dans la liste provisoire ou de les en exclure.

7. La procédure de recours a été ouverte par la Commission d'identification le 15 juillet, date à laquelle la première partie de la liste provisoire des personnes habilitées à voter a été communiquée aux parties par mon Représentant spécial et rendue publique. La première partie comprenait 84.251 noms de demandeurs déclarés aptes à voter sur les 147.249 identifiés durant les deux premières phases du processus, du 28 août 1994 au 22 décembre 1995 et du 3 décembre 1997 au 3 septembre 1998. Le 16 juillet, répondant à une lettre du Ministre de l'intérieur, M. Basri, sur la question des cas réexaminés au nombre de plusieurs milliers, mon Représentant spécial a fait savoir que, par souci de transparence, la Commission d'identification fournirait aux parties la liste des cas réexaminés. Ceci a été fait le jour même. Le 4 août, le Ministre des affaires étrangères, M. Benaïssa, a de nouveau exprimé des préoccupations au sujet de la question du réexamen, lors d'une réunion que j'ai eue avec lui au siège.

8. Trois centres de recours ont été ouverts dans un premier temps : à Laayoune dans le territoire, à Camp Smara dans la région de Tindouf, en Algérie, et à Nouadhibou, en Mauritanie. Des centres supplémentaires ont été ouverts ensuite le 2 juillet à Tan-Tan et à Goulimine, dans le sud du Maroc: le 2 août à Marrakech au Maroc, à Dakhla, Boujdour et Smara, dans le territoire, et à Zouerate en Mauritanie; le 9 août à Sidi Kacem, Al Kalaa, Meknès, Rabat et Casablanca, au Maroc, plus un second centre mobile ouvert également dans la région de Tindouf pour desservir les camps d'El Aiun, de Dakhla et d'Awsard. Au 11 août 1999, un total de 18.914 personnes s'étaient présentées dans les centres et avaient soumis 22.159 demandes d'extraits des dossiers pour elles mêmes et pour les membres de leur famille immédiate, 520 avaient demandé de consulter leur propre dossier original et 1.999 recours avaient été déposés.

9. Les 20 et 21 juillet, le Ministre de l'intérieur, M. Basri, accompagné d'une délégation de ministres du gouvernement marocain, s'est rendu à Laayoune, où il a rencontré les cheikhs, les observateurs marocains et d'autres responsables. Dans une allocution publique qu'il a prononcée à cette occasion, M. Basri a relevé que la liste provisoire contenait les noms de 46 255 électeurs du Maroc (et du territoire), 33 786 électeurs des camps de Tindouf et 4 210 de Mauritanie. Il a déclaré à cette occasion que certains membres de la Commission d'identification manqueraient d'impartialité. La même critique est apparue dans la presse marocaine.

10. Deux questions ont quelque peu retardé l'opération d'identification pour certaines tribus du groupement H61, notamment la désignation des cheikhs et celle de leurs conseillers. D'après le paragraphe 9 du protocole relatif à l'identification (voir S/1999/483/ADD.1), les parties désignent chacune deux cheikhs pour l'identification des requérants de la tribu Aït Ousa, la première paire avant le 1er juin 1999 et la seconde avant le 1er août 1999. Le Maroc n'a toujours pas désigné ses deux cheikhs. Quant à la question des conseillers des cheikhs, elle ne concerne que les 13 tribus mentionnées au paragraphes 10 du protocole. A ce sujet, le Maroc s'est plaint que les conseillers désignés par le Front POLISARIO ne faisaient pas partie des tribus concernées. La Commission d'identification et le secrétariat de l'Organisation des Nations Unies étaient d'avis que, d'après le paragraphe 10 du protocole relatif à l'identification, le conseiller désigné par chacune des 13 tribus ne devait pas nécessairement faire partie de la tribu concernée. Initialement prévue pour le 30 juin 1999, l'identification des requérants issus de ce groupe de tribus à dû être reportée en attendant que cette question soit réglée.

11. Compte tenu de la pénurie des effectifs, qui avait entraîné l'ouverture échelonnée des centres de recours, et de la persistance des problèmes liés aux opérations d'identification, la Commission d'identification a décidé avec l'accord des parties, d'affecter tout le personnel disponible au processus de recours et de suspendre les opérations d'identification pendant trois semaines, à compter du 2 août 1999.

12. La Commission d'identification a tenu une réunion pour les agents d'enregistrement le 11 juillet 1999, et une réunion mixte pour les membres de la Commission et les agents d'enregistrements, avec la participation de mon Représentant spécial, les 28 et 29 juillet 1999. Ces réunions avaient pour objet d'évaluer l'expérience acquise au cours des opérations d'identification et de recours de ces dernières semaines et d'échanger des vues sur l'élaboration de directives précises relatives à la réception des demandes de recours, de façon à ce que tout le personnel de la Commission applique strictement les dispositions des protocoles relatifs à l'identification et aux recours.

B. Aspects militaires

13. Au 9 août 1999, la composante militaire de la MINURSO comptait 230 observateurs militaires et autres (voir annexe). Sous le commandement du général de divison Bernd S. Lubenik (Autriche), la composante a continué à surveiller le cessez-le-feu entre l'Armée royale marocaine et les forces du Front POLISARIO, entré en vigueur le 6 septembre 1991. La zone placée sous la responsabilité de la MINURSO reste calme et rien n'indique que l'une ou l'autre partie entende reprendre les hostilités dans un avenir proche.

14. En ce qui concerne l'application des dispositions concernant le port d'armes qui figurent au paragraphe 42 de l'accord sur le statut des forces conclu entre l'Organisation des Nations Unies et le Maroc, le Secrétariat de l'Organisation examine actuellement un projet de proposition à cet effet élaboré par la MINURSO.

15. Des progrès sensibles ont été réalisés dans l'application des accords militaires conclus entre la MINURSO et chacune des parties au sujet du marquage et de la destruction des munitions non explosées et de l'échange de renseignements détaillés sur ce point. Les deux parties ont continué de coopérer pleinement: environ 60 % des tâches à l'ouest du mur de sable défensif (le rempart) et 30 % des tâches à l'est du rempart ont été menées à terme.

16. A la suite des réunions entre la MINURSO et le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), il a été convenu que des patrouilles de reconnaissance mixtes seraient effectuées dans toute la zone de responsabilité afin de repérer des routes pouvant se prêter au rapatriement des réfugiés. Ces patrouilles ont commencé le 26 juillet 1999.

C. Police civile

17.La composante police civile de la MINURSO aide la Commission d'identification aux centres d'identification et de recours. Elle compte actuellement 78 policiers civils (voir annexe), sur un effectif autorisé de 81 policiers, placés sous le commandement du commissaire adjoint, le commandant assistant Sunil Roy (Inde). Les deux policiers civils restants devraient arriver prochainement. Outre l'effectif autorisé de 81 policiers, 25 policiers civils seront nécessaires pour aider la Commission d'identification à mener simultanément, s'il y a lieu, le processus d'identification et la procédure de recours.

D. Préparatifs du rapatriement des réfugiés sahraouis

18. Au cours de la période considérée, le HCR, agissant en consultation et en coordination étroites avec la MINURSO, a poursuivi ses préparatifs en vue du rapatriement de réfugiés sahraouis, comme le prévoit le Plan de règlement des Nations Unies. Une mission du HCR a séjourné à Laayoune du 13 au 15 juillet 1999 afin d'examiner avec la MINURSO les préparatifs en cours, compte tenu du nouveau calendrier fixé pour l'exécution du Plan. Les travaux ont porté sur des questions politiques restées en suspens, la planification logistique, les mesures de renforcement des capacités et des aspects administratifs. Le HCR et la MINURSO sont convenus qu'une approche commune était nécessaire et ont décidé d'organiser un atelier de suivi à Laayoune, en septembre 1999.

19. Le 15 juillet 1999, à Rabat, le Ministre de l'intérieur, M. Basri a indiqué, à l'occasion d'un bref entretien avec le HCR, que son gouvernement offrait à celui-ci son appui et sa coopération sans réserve afin de lui permettre de mener à bien son action pour le retour des réfugiés, conformément à son mandat et aux dispositions du Plan de règlement. Dans le même temps, mon Représentant spécial et un représentant du HCR se sont rendus à Tindouf pour y rencontrer le Secrétaire général du Front POLISARIO, M. Mohamed Abdelaziz, son agent de liaison avec la MINURSO, M. Emhamed Khaddad, et d'autres hauts responsables du Front POLISARIO et faire le point des préparatifs en cours pour le rapatriement des réfugiés entre autres questions. Sur le chemin de retour vers Laayoune, mon Représentant spécial s'est arrêté à Bir Lahlou, Mehaires et Smara, où il a rendu visite aux équipes d'observateurs de la MINURSO, il a pu ainsi se rendre compte par lui-même de ce qu'était la principale route qu'emprunteraient les réfugiés.

20. Le projet de plan d'action pour les mesures de renforcement de la confiance présenté au Conseil de sécurité en juin 1999 a ensuite été soumis à l'examen des parties, dont on souhaitait la coopération au sujet des procédures et du calendrier de mise en œuvre. Durant les discussions préliminaires, les deux parties ont reconnu l'importance d'activités transfrontières pour que la confiance s'instaure dans les camps aussi bien qu'à l'intérieur du territoire. Le projet de plan sera examiné à Tindouf avec le Front POLISARIO, et il sera discuté avec les autorités marocaines lors d'une mission qui devrait avoir lieu à la fin du mois d'août. 1999

21. Des sorties conjointes de reconnaissances MINURSO-HCR ont eu lieu à l'est et à l'ouest du mur de sable défensif ("rempart") afin de réunir les informations nécessaires à la planification du retour des réfugiés. Les opérations de préenregistrement et d'évaluation des besoins des réfugiés dans les camps de Tindouf se poursuivent. A ce jour, 22.656 personnes (soit 3.075 familles) ont été préenregistrées au camp d'El Aiun. L'opération de préenregistrement a également repris à Nouadhibou et à Zouerate, dans le nord de la Mauritanie, où 548 personnes (121 familles) ont été préenregistrées.

III. ASPECTS FINANCIERS

22. Par sa résolution 53/18 B du 8 juin 1999, l'Assemblée générale a décidé d'ouvrir, aux fins du fonctionnement de la MINURSO du 1er juillet 1999 au 30 juin 2000, un crédit d'un montant de 52,1 millions de dollars, soit l'équivalent d'un montant mensuel de 4,3 millions de dollars. Si des ressources supplémentaires étaient nécessaires pour le processus d'identification et de recours, je demanderais à l'assemblée générale de réexaminer la question.

23.Au 31 juillet 1999, le montant des contributions non acquittées au compte spécial de la MINURSO s'élevait à 60,9 millions de dollars. A la même date, le montant total des contributions non acquittées au titre de l'ensemble des opérations de maintien de la paix s'élevait à 1 929 700.000 dollars.

IV. OBSERVATIONS

24. La reprise des opérations d'identification et la mise en route des procédures de recours ont été réalisées et la première partie de la liste provisoire des personnes habilitées à voter a été publiée. Le HCR et la MINURSO, avec les parties concernées, accélèrent maintenant les préparatifs du rapatriement des réfugiés. Il est important aujourd'hui de donner effet rapidement aux mesures de renforcement de la confiance en mettant en place des moyens de communication et en organisant des visites.

25. Il faut reconnaître cependant que le temps passé à régler certaines questions à propos du processus d'identification et l'étalement de l'ouverture des centres d'appel, sans compter les difficultés pour trouver des ressources humaines suffisantes, ont parfois nui au respect du calendrier du processus référendaire.Le Secrétariat cherche spécialement à porter les effectifs de la Commission d'identification aux niveaux nécessaires. Toutefois, compte tenu du nombre croissant de requérants qui se présentent dans les centres de recours et du nombre inattendu de demandes à traiter, et du fait que le processus d'identification et la procédure de recours se déroulent simultanément, il faudra éventuellement prévoir des ressources supplémentaires pour que les échéances fixées puissent être respectées. Il est essentiel que les deux parties concernées coopèrent pleinement avec la MINURSO pour que le processus d'identification et la procédure de recours se déroulent dans les délais prévus.

 

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