Nations Unies

S/2000/461

Conseil de sécurité

Distr. générale

22 mai 2000

Français
Original: anglais

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Rapport du Secrétaire général sur la situation concernant le Sahara occidental

I. Introduction

1. Le présent rapport est soumis en application de la résolution 1292 (2000) du Conseil de sécurité, en date du 29 février 2000, par laquelle le Conseil a décidé de proroger le mandat de la Mission des Nations Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO) jusqu'au 31 mai 2000 et m'a prié de faire le point de la situation avant l'expiration dudit mandat. Dans cette résolution, le Conseil de sécurité s'est félicité de mon intention de demander à mon Envoyé personnel, James A. Baker III, de prendre l'avis des parties, le Royaume du Maroc et le Front populaire pour la libération de Saguía el-Hamra et du Río de Oro (Front POLISARIO), et compte tenu des obstacles existants et potentiels, d'étudier les moyens de parvenir à un règlement rapide, durable et concerté de leur différend. Le présent rapport décrit les faits nouveaux intervenus depuis mon précédent rapport au Conseil, en date du 17 février 2000 (S/2000/131).

II. Faits nouveaux intervenus pendant la période à l'examen A. Visite de l'Envoyé personnel du Secrétaire général dans la région

2. Conformément à la résolution 1292 (2000) du Conseil de sécurité et après s'être entretenu avec moi, au 11 avril 2000 afin d'y procéder à des échanges de vues préliminaires avec les deux parties et les deux pays voisins. Lors de son arrivée à Alger, le 8 avril, M. Baker et sa délégation ont été rejoints par mon Représentant spécial pour le Sahara occidental, M. William Eagleton. L'ancien Secrétaire d'État adjoint aux organisations internationales des États-Unis, M. John R. Bolton, a participé à la mission de mon Envoyé personnel en tant qu'adjoint.

3. À Alger, mon Envoyé personnel a été reçu par le Ministre de la justice algérien, Ahmed Ouyahia, et a également rencontré le Premier Ministre, Ahmed Benbitour, le Ministre de l'intérieur, Yazid Zerhouni, le Président du Conseil national algérien, Bachir Boumaza, et d'autres hauts responsables gouvernementaux.

4. Dans la région de Tindouf, le 9 avril, mon Envoyé personnel a rencontré le Secrétaire général du Front POLISARIO, Mohamed Abdelaziz, le coordonnateur du Front POLISARIO avec la MINURSO, M'hamed Khaddad, les représentants du Front POLISARIO à New York et à Washington, Ahmed Bukhari et Moulud Said, et d'autres membres importants du Front POLISARIO. Il a également rencontré le chef de la délégation d'observation de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) auprès de la MINURSO, Yilma Tadesse.

5. À Rabat, le 10 avril, mon Envoyé personnel a été reçu par le Roi Mohammed VI, et a rencontré le Prince héritier Moulay Rachid, le Premier Ministre du Maroc, Abderrahmane Youssoufi, le Ministre des affaires étrangères et de la coopération, M. Mohamed Benaissa, le Ministre de l'intérieur, M. Ahmed El Midaoui, le Secrétaire d'État à l'intérieur, M. Ali Al Himma, le coordonnateur marocain avec la MINURSO, M. Mohamed Loulitchki, le Représentant permanent du Maroc auprès de l'Organisation des Nations Unies, M. Ahmed Snoussi, et d'autres hauts responsables gouvernementaux.

6. Pour des raisons de santé, mon Envoyé personnel n'a pas pu se rendre à Nouakchott le 11 avril, mais a évoqué au téléphone sa mission avec le Président de la Mauritanie, M. Maaouya Ould Sid'Ahmed Taya.

7. À son retour de la région, le 12 avril, mon Envoyé personnel a entrepris des consultations avec les autorités espagnoles et françaises à Madrid et à Paris.

8. Je saisis cette occasion pour remercier le Gouvernement espagnol d'avoir décidé de mettre à la disposition de mon Envoyé personnel un avion qui a grandement facilité le déroulement de sa visite dans la région.

B. Réunion des parties sous les auspices de l'Envoyé personnel du Secrétaire général (Londres, 14 mai 2000)

9. Suite à ses contacts préliminaires dans la région, mon Envoyé personnel m'a fait savoir qu'il serait nécessaire de convoquer une réunion entre les parties afin d'examiner les problèmes relatifs à l'application du plan de règlement des Nations Unies (S/21360 et S/22464 et Corr.1) et des accords de Houston (S/1997/742, annexes I à III), ainsi que d'autres approches éventuelles. J'ai pleinement souscrit à ses vues et, dans des lettres datées du 25 avril 2000, ai invité les parties à tenir des débats de haut niveau en face à face à Londres le 14 mai 2000, sous les auspices de mon Envoyé personnel. J'ai précisé dans ces lettres que les débats seraient d'ordre privé et que, comme cela avait été le cas lors des débats directs tenus sous les auspices de mon Envoyé personnel en 1997, aucune question ne serait considérée comme définitivement réglée tant que toutes les questions en suspens n'auraient pas été résolues. Dans des lettres similaires, j'ai invité les deux pays voisins, l'Algérie et la Mauritanie, à participer à la réunion de Londres en tant qu'observateurs.

10. La réunion a eu lieu à Londres le 14 mai 2000 comme prévu. Les parties se sont rencontrées en personne pour la première fois depuis les pourparlers directs personnel à Londres, Lisbonne et Houston en 1997. L'Algérie et la Mauritanie ont dépêché des délégations d'observateurs à la réunion.

11. Les débats se sont caractérisés par un échange honnête de vues mais n'ont toutefois pas abouti à des résultats concluants. A la fin des débats mon Envoyé personnel a demandé aux parties de présenter lors d'une réunion, peut-être en juin, des solutions concrètes aux multiples problèmes relatifs au plan de règlement sur lesquels les parties pourraient tomber d'accord, ou d'être prêtes à envisager et examiner d'autres façons de parvenir à un règlement rapide, durable et concerté de leur différend sur le Sahara occidental.

12. Je souhaite saisir cette occasion pour remercier le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord d'avoir accueilli ces pourparlers directs.

C. Procédures de recours

13. Au cours de la période considérée, mon Représentant spécial a continué de s'efforcer de trouver des moyens de mettre en oeuvre sans heurts le Plan de règlement, en particulier pour ce qui est du début de la procédure de recours à l'issue de la publication de la deuxième partie de la liste provisoire des personnes admises à voter le 17 janvier 2000. À cet effet, il a rencontré le Ministre marocain des affaires étrangères à Rabat le 25 mars 2000, et le coordonnateur du Front POLISARIO avec la MINURSO dans la région de Tindouf les 4 et 18 avril. Le Président de la Commission d'identification de la MINURSO, Eduardo Vetere, a également rencontré ce dernier le 18 avril.

14. La deuxième partie de la procédure de recours a commencé lorsque la deuxième partie de la liste provisoire des personnes admises à voter, qui contenait les noms de requérants individuels appartenant aux groupements tribaux H41, H61 et J51/52, a été communiquée par mon Représentant spécial aux deux parties le 17 janvier 2000. Le 25 février, à l'issue de la période de six semaines prévue, la Commission d'identification a cessé d'accepter les recours dans tous ses centres (dans le Territoire, au Maroc, dans la région de Tindouf en Algérie et en Mauritanie). À ce moment-là, la MINURSO avait reçu 54 889 recours pour la deuxième partie de la liste provisoire des personnes admises à voter. Une analyse préliminaire de ces recours montre qu'une énorme majorité des recours présentés (53 327) porte sur la non-inscription sur cette liste. Sur ce chiffre, 49 138 recours concernent des requérants du Maroc et du Territoire, dont la plupart ont l'intention de présenter au moins un témoin à l'appui de leur requête. La plupart des 1 562 autres recours, présentés par 22 personnes, remettent en cause l'inscription de requérants sur la deuxième liste provisoire de personnes admises à voter. Plus des deux tiers de ces recours ont été introduits par des personnes résidant au Maroc ou dans le Territoire. On trouvera au tableau figurant à l'annexe I du présent rapport le nombre de recours formés par lieu de présentation et par catégorie générale.

15. Cinq réunions du personnel de la Commission d'identification tenues à Agadir ont permis de dresser un bilan de la situation et de faire des projets. Des simulacres de sessions et des ateliers de simulation ont eu lieu dans quatre centres de recours afin de s'assurer de l'efficacité des procédures et des modalités portant sur la recevabilité et l'examen des recours.

16. La Commission d'identification espère pouvoir terminer en juin 2000 le traitement et l'analyse des 79 000 dossiers reçus concernant la première partie de la liste provisoire des personnes admises à voter publiée le 15 juillet 1999. Avec les 54 889 recours reçus de requérants individuels appartenant aux groupements tribaux H41, H61 et J51/52, cela porte à plus de 130 000 le nombre de dossiers enregistrés électroniquement par le système d'information de la Commission, qui contient également quelque 244 000 dossiers d'identification.

D. Aspects militaires

17. Au 16 mai 2000, les effectifs de la composante militaire de la MINURSO étaient de 230 hommes, tous grades confondus (voir annexe II). Sous le commandement du général de brigade Claude Buze (Belgique), la composante militaire a continué de surveiller le cessez- le-feu entre l'Armée royale marocaine et les forces militaires du Front POLISARIO, entré en vigueur le 6 septembre 1991. La zone qui relève de la responsabilité de la MINURSO demeure calme et l'on ne sache les hostilités dans un proche avenir.

18. La mise en oeuvre des accords militaires entre la MINURSO et les deux parties sur le marquage et la neutralisation des mines et des munitions non explosées et sur l'échange connexe d'informations détaillées s'est poursuivie. Au cours de la période considérée, l'Armée royale marocaine et les forces du Front POLISARIO ont effectué au total 21 opérations de neutralisation d'explosifs et de munitions.

E. Police civile

19. La composante police civile de la MINURSO compte actuellement 80 membres, placés sous le commandement de l'inspecteur général Om Prakash Rathor (Inde). Pendant la période considérée, ils ont continué de seconder la Commission d'identification en assurant la protection des dossiers et des documents confidentiels dans les centres de recours.

F. Préparatifs en vue du rapatriement des réfugiés sahraouis

20. Pendant la période considérée, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), agissant en collaboration et en consultation étroites avec la MINURSO, a poursuivi ses préparatifs en vue du rapatriement des réfugiés sahraouis, comme le prévoit le plan de règlement.

21. Le HCR a continué d'exécuter à Tindouf l'opération de préenregistrement des réfugiés en vue du rapatriement de ceux qui ne se trouvaient pas dans les camps lors de la phase antérieure d'enregistrement. À ce jour, le nombre total de réfugiés (représentant 18 751 familles), y compris les membres de leur famille immédiate, préenregistrés depuis le début des opérations en août 1997 à l'aide des listes provisoires des personnes admises à voter établies par la MINURSO, est de 119 698. Dans leur immense majorité, les réfugiés ont continué de faire savoir qu'ils souhaitaient être rapatriés seulement dans la partie du territoire situé à l'est du mur de sable, car ils craignaient pour leur sécurité. Le Programme alimentaire mondial et le HCR ont envoyé à Tindouf, du 9 au 13 mars 2000, une mission conjointe d'évaluation des besoins alimentaires pour élaborer un nouveau projet d'assistance et mettre en place des mécanismes améliorés de coordination, de suivi et d'évaluation du projet.

22. Mon Représentant spécial et le HCR ont poursuivi les consultations pour commencer à appliquer des mesures de confiance transfrontières, y compris des visites familiales, mais ces consultations n'ontpas permis de venir à bout des réserves exprimées par les parties au sujet de l'application de telles mesures. En particulier, le Front POLISARIO continue d'exprimer des inquiétudes au sujet des garanties de sécurité dans la partie du territoire située à l'ouest du mur de sable, inquiétudes confirmées par les réfugiés des camps de Tindouf, qui jugent que s'ils retournaient dans ce secteur, leur sécurité ne serait toujours assurée.

III. Aspects financiers

23. Dans sa résolution 53/18 B du 8 juin 1999, l'Assemblée générale a ouvert un crédit d'un montant de 52,1 millions de dollars aux fins du fonctionnement de la Mission du 1er juillet 1999 au 30 juin 2000. En ce qui concerne l'exercice financier suivant (1er juillet 2000-30 juin 2001), j'ai proposé, pour financer les dépenses de fonctionnement de la Mission, un budget de 46,6 millions de dollars (équivalant à un montant mensuel d'environ 3,9 millions de dollars), et ce budget a été présenté à l'Assemblée générale pour qu'elle l'examine au cours de la deuxième partie de la reprise de sa cinquante-quatrième session. L'Assemblée devrait se prononcer sous peu sur ce projet de budget. En conséquence, si le Conseil approuvait ma recommandation, formulée plus loin au paragraphe 28, en ce qui concerne la reconduction du mandat de la MINURSO, les dépenses de fonctionnement de la Mission resteraient dans les limites du crédit ouvert par l'Assemblée au titre de la MINURSO pour l'exercice 1999-2000 en cours et du montant mensuel proposé dans mon budget pour l'exercice 2000-2001. 24. Au 15 mai 2000, le montant des contributions non acquittées au Compte spécial de la MINURSO s'élevait à 76,5 millions de dollars. À la même date, le montant total des contributions non acquittées au titre de l'ensemble des opérations de maintien de la paix s'établissait à 2 078 200 000 dollars.

IV. Observations et recommandations

25. Comme suite aux recommandations et observations consignées dans mon précédent rapport (S/2000/131), et en application de la résolution 1292 (2000) du Conseil de sécurité, j'ai demandé à mon Envoyé personnel de prendre l'avis des parties et, compte tenu des obstacles existants et potentiels, d'étudier les moyens de parvenir à un règlement rapide, durable et concerté de leur différend. Je tiens à remercier M. Baker des efforts qu'il déploie à cette fin.

26. Au cours des consultations qu'il a tenues avec les parties et les pays voisins dans la région entre les 8 et 11 avril 2000 et à Londres le 14 mai, mon Envoyé personnel a fait valoir que l'application du plan de règlement était entravée depuis neuf ans par les divergences fondamentales de vues entre les parties au sujet de l'interprétation à donner à ses dispositions principales, et que tout donnait à penser que le référendum ne pourrait pas se tenir avant longtemps.

27. La réunion de Londres du 14 mai était importante en ce qu'elle avait permis aux parties de se rencontrer en vue de pourparlers directs pour la première fois depuis ceux qui s'étaient déroulés en 1997 sous les auspices de mon Envoyé personnel. Force était toutefois de constater que les vues exprimées par les deux parties ne servaient qu'à confirmer l'Organisation des Nations Unies dans son opinion qu'elles étaient très divergentes et qu'aucune partie ne faisait aucune proposition constructive sur la façon d'aller de l'avant. Dans ces conditions, mon Envoyé personnel a demandé aux parties, en prévision d'une rencontre ultérieure qui pourrait avoir lieu en juin 2000, de présenter des solutions concrètes pouvant faire l'objet d'un accord, afin de régler toutes les questions du plan de règlement en suspens, ou d'être prêtes à étudier d'autres moyens de parvenir à un règlement rapide durable et concerté de leur différend au sujet du Sahara occidental.

28. Je veux espérer que, comme l'a demandé mon Envoyé personnel, les parties présenteront des propositions concrètes lors de la rencontre proposée. Comme il s'est avéré, au fil des ans, très difficile de rapprocher leurs points de vue, et que le plan de règlement ne prévoit aucun mécanisme de mise en oeuvre, il s'imposerait que les parties proposent à présent des solutions spécifiques et concrètes aux multiples problèmes liés à l'application du plan de règlement et sur lesquelles elles puissent s'entendre, ou, à défaut, qu'elles soient prêtes à étudier d'autres moyens de parvenir à un règlement rapide, durable et concerté de leur différend au sujet du Sahara occidental. Dans l'intervalle, je recommande au Conseil de sécurité de proroger le mandat de la MINURSO pour une période de deux mois s'achevant le 31 juillet 2000.

original en format PDF, avec annexes


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