[archives arso, publication papier 1993]

Reflets de l'actualité au Sahara Occidental - juillet 1993
 

Premières négociations directes Maroc-Front Polisario

Pour la première fois depuis le début du conflit du Sahara occidental, des représentants du Maroc et du Front Polisario vont se rencontrer officiellement pour des négociations directes. Pour la première fois une délégation sahraouie se rend au Sahara occidental occupé. La rencontre de janvier 1989 à Marrakech entre Hassan II et des responsables sahraouis n'était qu'une prise de contact.

Le film des événements:

1.7. Des représentants du Maroc et du Front Polisario se rencontreront le 15 juillet à El Ayoun, capitale du Sahara occidental, annonce Boutros-Ghali lors d'une conférence de presse à Genève, pour tenter de parvenir à un accord sur les modalités du référendum, qui devrait se tenir, selon les voeux du Secrétaire général, encore cette année. Aucune des deux parties n'a encore pleinement accepté le compromis (toujours secret) élaboré par les N.U. en mai de cette année, ajoute-t-il. Cependant, dans une déclaration à l'Agence algérienne de presse APS le 20.6. Bachir Moustapha Sayed avait déclaré n'avoir «plus aucune réserve sur les critères de Pérez de Cuéllar et sur son rapport du 19 décembre 1992».

3.7. Le Front Polisario se dit prêt à participer à la rencontre (Radio Alger).

7.7. Le Maroc accueillera les leaders du Polisario «à bras ouverts», déclare le ministre marocain de l'intérieur Driss Basri. Selon les Marocains, il s'agit d'une rencontre entre chefs de tribus des deux parties. Pour le Polisario, il s'agit d'une rencontre entre responsables marocains et sahraouis. Jeune Afrique écrit que la réunion devrait mettre face à face de simples "techniciens" et des chefs de tribus des deux camps. Eric Jensen, chef de la Commission d'identification, annonce qu'il procédera à l'enregistrement des électeurs immédiatement après la rencontre.

8.7. Le roi Hassan II, dans un discours radiodiffusé, espère que la rencontre sera une «réunion de la tolérance et de la réconciliation afin que nous puissions construire ensemble un pays uni». 

10.7. Rencontre à Londres de Bachir Moustapha Sayed avec des responsables du département des affaires étrangères. Dans un interview il déclare suspecter Boutros-Ghali et Yakoub Khan de parti-pris contre le Front Polisario. Il dénonce aussi la position pro-marocaine du gouvernement français.

12.7. Rencontre à Tindouf entre le premier ministre algérien, Abdessalam Belaïd, et le chef de l'état sahraoui. Mohamed Abdelaziz déclare ensuite, dans un interview, être prêt à des concessions afin de parvenir à «une solution intermédiaire». Il s'attend à ce que la rencontre d'El Ayoun soit le début d'une série d'entretiens.

16.7. Arrivée de la délégation sahraouie à El Ayoun en provenance de Tindouf dans un avion de l'ONU. La délégation dirigée par Bachir Moustapha Sayed comprend onze personnes, dont six appartiennent à la direction politique du Front. Elle s'est refusée à toute déclaration à son arrivée. Les journalistes avaient d'ailleurs été éloignés de l'aéroport. La délégation est hébergée à l'hôtel Parador, quartier-général de l'ONU, où ont lieu les discussions. La délégation marocaine est arrivée dans la soirée, dirigée par l'ambassadeur du Maroc auprès des N.U., Achmed Senoussi. Elle comprend un haut fonctionnaire du Ministère de l'Intérieur ainsi que neuf notables marocains d'origine sahraouie. L'ordre du jour n'a pas été rendu public. La population civile sahraouie a été menacée de sanctions graves en cas de manifestation.

17.7. Premières rencontres entre les deux délégations, en présence de Yakoub Khan, délégué spécial pour le Sahara. Eric Jensen déclare que les pourparlers dureront trois à cinq jours. Bachir, qui s'est entretenu en tête à tête avec les responsables marocains, affirme que les négociations se déroulent «dans de bonnes conditions» et qu'elles continueront probablement le lendemain. Cependant, selon nos dernières informations, les entretiens n'ont pas repris dimanche 18 juillet, le Front Polisario déniant toute représentativité à la délégation marocaine et désirant négocier avec une vraie délégation politique et gouvernementale.

Premières négociations directes Maroc-Front Polisario (suite)

El-Ayoun, 16-19 juillet 1993

18.7. Contrairement à ce que nous annoncions  plus haut les pourparlers se sont poursuivis aujourd'hui sans interruption, pour se terminer lundi 19.7.

19.7. Dans son allocution lors de la séance de clôture Bachir Sayed, le chef de la délégation sahraouie, estime être venu à El-Ayoun «dans le but de faciliter la mise en oeuvre du Plan de règlement». Constatant le peu de résultats de la rencontre il ajoute: «L'important est la mise en route du dialogue (...) Nous souhaitons que dans un proche avenir l'on puisse continuer l'oeuvre entamée pour nous attaquer aux problèmes posés et débattre des moyens de débloquer le Plan».

Pour la délégation marocaine il s'agissait d'un «contact exploratoire» afin de discuter des voies et moyens de l'intégration des «Sahraouis de Tindouf» au sein de l'entité nationale marocaine, par la voie de la politique de régionalisation décidée par le roi. La délégation marocaine représentait le "Conseil consultatif royal pour les affaires sahariennes", complété par l'ambassadeur du Maroc auprès des Nations unies et un haut fonctionnaire du ministère de l'intérieur. La rencontre n'avait pas pour but, toujours selon Rabat, de discuter du Plan de paix, qui «est en de bonnes mains à New York»... Les Marocains déclarent souhaiter voir s'établir un «climat de sérieux et de responsabilité» qui «peut permettre d'envisager d'autres rencontres».

19.7. Interviewé par Radio Alger Mohamed Lamine Achmed, ambassadeur sahraoui à Alger, a précisé que «le soi-disant "Conseil consultatif pour les affaires marocaines" n'a pas d'existence légale. Il a pour but de tenter de légitimer l'occupation d'un pays par un autre, comme toujours dans ce genre de situation. Avant le départ de notre délégation pour El-Ayoun, le Maroc avait nommé son ambassadeur à l'ONU chef de sa délégation, pour lui substituer ensuite les membres du soi-disant Conseil consultatif».

20.7. Selon le représentant du Front POLISARIO en France la prochaine réunion marocco-sahraouie devrait se tenir ces prochains jours à Paris (Radio Alger).

22.7. Selon Radio Alger la rencontre d'El-Ayoun est à considérer comme «le début de pourparlers préliminaires», du fait que les Marocains ont refusé de parler du processus référendaire.

23.7. Visite officielle du premier ministre français au Maroc. M. Balladur a déclaré, dans une conférence de presse, avoir procédé avec son homologue marocain à un échange de vues sur le Sahara occidental et sur «les perspectives de règlement que nous appelons de nos voeux». Paris est prêt «chaque fois qu'on le souhaite et chaque fois que toutes les parties le demandent, à favoriser les conversations qui peuvent parvenir à la paix».

28.7. rapport Boutros-Ghali {S/93/26185)

Le secrétaire général de l'ONU fait le point après sa visite dans la région et les discussions sur le compromis proposé aux deux parties sur le problème des critères d'identification des votants. «Le Maroc a accepté le compromis sous sa forme actuelle», écrit-il. Le Front Polisario de son côté a accepté les critères proposés par Pérez de Cuéllar (le soi-disant compromis onusien correspond en fait aux critères définis par l'ancien secrétaire général) ainsi que le témoignage oral (en l'absence de documents écrits), tout en proposant plusieurs amendements au texte. FinalementBoutros-Ghali exprime sa satisfaction après la réunion d'El Ayoun, qui, espère-t-il, «facilitera l'application du plan de règlement».

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